Coupure des réseaux Internet en Birmanie : RSF dénonce une nouvelle étape dans la régression démocratique
Reporters sans frontières (RSF) condamne avec la plus grande fermeté la décision prise par le gouvernement birman de suspendre les réseaux Internet dans plusieurs zones de l’ouest du pays, et exige le rétablissement de ce canal d'information indispensable au travail journalistique et à l’apaisement des tensions.
Près d’un million de personnes coupées de toute connexion Internet… C’est le sort qui touche depuis cinq jours les habitants de huit cantons de l’Etat de l’Arakan et un canton de l’Etat Chin, situés dans l’ouest de la Birmanie. Le 20 juin, le ministère des Transports et des Communications a en effet ordonné aux quatre opérateurs téléphoniques actifs dans le pays de suspendre, à compter du lendemain, tout réseau Internet dans cette zone, comme l’a révélé dans un communiqué le groupe norvégien Telenor. Les autorités justifient leur décision en avançant des “atteintes à la paix” et “l'utilisation de l’Internet pour coordonner des activités illégales”.
“Cette coupure de l’Internet est d’autant moins acceptable que les journalistes sont systématiquement entravés dans leur couverture des tensions de cette région, déplore Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF. Le gouvernement d’Aung San Suu Kyi doit comprendre que la prévention des conflits et la recherche d’une paix durable passent justement par la libre circulation d’informations fiables, qui sont permises par l’exercice du journalisme. Cette violation choquante de la liberté d’informer est un nouveau signe de l’impasse dans laquelle se trouve la transition démocratique en Birmanie.”
La suspension des connections Internet se concentre sur une zone marquée par l’intensification, ces six derniers mois, du conflit qui oppose la Tatmadaw, l’armée birmane, aux rebelles autonomistes de l’Armée de l’Arakan. C’est cette même région de l’Arakan qu’ont dû quitter, à partir d’août 2017, plus de 730.000 réfugiés rohingyas qui ont fui le déclenchement de ce que l’ONU désigne comme un génocide perpétré par les militaires birmans.
Les journalistes de Reuters Wa Lone et Kyaw Soe Oo ont été condamnés à sept ans de prison en septembre 2018 pour avoir voulu enquêter sur ce drame. Bien que graciés en mai dernier, le message envoyé par les autorités aux autres journalistes est glaçant : un an et demi de prison, voilà ce qu’il vous en coûtera si vous osez enquêter sur les sujets interdits.
En chute d’une place par rapport à 2018, la Birmanie occupe actuellement la 138ème place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse.