Attaques coordonnées contre les antennes locales d’un journal turc en Europe

Reporters sans frontières condamne fermement les attaques menées quasi-simultanément contre les locaux de l’hebdomadaire conservateur turc Zaman en Allemagne et en France, le 15 février 2012. « Nous sommes vivement préoccupés par la violence croissante des attaques subies par Zaman. Rien ne saurait justifier ces graves actes d’intimidation, qui auraient pu avoir des conséquences plus tragiques encore. Nous espérons que les enquêtes menées par les polices allemande et française permettront rapidement d'interpeller tous les auteurs et organisateurs de ces attaques », a déclaré l’organisation. « Nous le répétons, la presse turque doit cesser d’être assimilée aux acteurs politiques locaux. Le gouvernement ne saurait être ciblé à travers Zaman, pas plus que les titres pro-kurdes ne devraient faire les frais de la lutte contre le PKK. Il est inquiétant de constater que les journalistes paient de plus en plus fréquemment le prix physique de la polarisation persistante des médias turcs. » Le 15 février 2012, vers 14h40, une quinzaine d’individus cagoulés a fait irruption dans les locaux de Zaman France à Pantin (banlieue parisienne). Ils ont physiquement menacé les journalistes et mis le bureau à sac. Aucun blessé n’est à déplorer, mais les membres de la rédaction sont choqués et les locaux ont subi des dégâts importants. Des ordinateurs, ainsi que du mobilier et des portes et fenêtres, ont été détruits. La rédaction a demandé à faire l’objet d’une protection policière et envisage de déménager. Il s’agit de la troisième attaque contre les locaux du journal en six mois. Dans la soirée du même jour, des individus ont lancé des cocktails Molotov et endommagé l’entrée des locaux de Zaman à Cologne (ouest de l’Allemagne). Peu après, ils s’en sont pris à un café turc voisin. Deux suspects, âgés de 17 et 22 ans, ont été arrêtés. D’après la rédaction de Zaman France, l’attaque a été revendiquée par un groupuscule se présentant comme proche du PKK, la « Brigade Euphrate de vengeance de la révolution ». La police allemande suit également la piste d’une possible implication de sympathisants de la rébellion kurde. Le 15 février est la date anniversaire de l'arrestation du leader du PKK, Abdullah Öcalan, en 1999. Le conflit opposant depuis 1984 les autorités centrales turques et le PKK a récemment regagné en intensité, avec une succession d’attentats terroristes et d’opérations militaires dépassant les frontières turques. La presse est de plus en plus otage de cet affrontement : plusieurs dizaines de journalistes travaillant pour la presse de gauche ou pro-kurde ont été arbitrairement incarcérés ces derniers mois dans le cadre d’une enquête visant le KCK, un réseau accusé de soutenir le PKK. Une trentaine d’entre eux, arrêtés lors d’une rafle simultanée dans plusieurs villes du pays en décembre 2011, n’ont toujours pas été informés des accusations retenues contre eux, et les arrestations se poursuivent. (Photos: Zaman France)
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Updated on 20.01.2016

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