Abus et arrestations en marge du procès des blogueurs

La deuxième audience des blogueurs Adnan Hadji Zadeh et Emin Milli, accusés de "hooliganisme" et de "violences physiques volontaires", s’est déroulée, le 16 septembre 2009, dans des conditions déplorables. Les journalistes et représentants d’ONG n’ont pas été autorisées à pénétrer dans le tribunal. Irrégularités et arrestations ont entouré le procès des blogueurs. Deux victimes sur trois ont été entendues, aux témoignages identiques, tandis que les blogueurs ont rejeté toutes les accusations. "Le procès des deux blogueurs viole allègrement les normes du droit européen auquel est soumis l’Azerbaïdjan. Leur arrestation et probable condamnation obéit à des motifs politiques et à une volonté de censure. Le juge Araz Huseynov et les autorités doivent se plier aux principes de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CESDHLF) dont l’Azerbaïdjan est signataire", a déclaré Reporters sans frontières. Des soutiens d’Adnan Hadji Zadeh et Emin Milli portant des T-shirts "I’m a hooligan too", présents devant le tribunal, ont été arrêtés et conduits au poste de police. Des représentants des ambassades des Etats-Unis, de la France, de la Norvège, du Conseil de l’Europe et de l’OSCE étaient présents au tribunal. La troisième audience aura lieu le 18 septembre. Voir la vidéo : http://www.globalpost.com/dispatch/russia-and-its-neighbors/090720/web-crackdowns-spread?page=0,1 ------------------------------------------------------------------- 15.09.2009 - Violation des droits de la défense de deux blogueurs, victimes d'accusations fallacieuses Le 16 septembre 2009, la seconde audience du procès des blogueurs Adnan Hadji Zadeh et Emin Milli, accusés de "hooliganisme" et de "violences physiques volontaires" va avoir lieu. Reporters sans frontières appelle le juge Araz Huseynov à entendre les voix des nombreuses organisations de défense des droits de l’homme et de certains Etats qui soutiennent la libération des deux blogueurs. "Nous réitérons notre demande de libération des blogueurs Adnan Hadji Zadeh et Emin Milli. Leur arrestation obéit à des motifs politiques et les accusations portées contre eux sont manifestement infondées. L’organisation s’indigne de la violation des droits de la défense et de la partialité des autorités judiciaires qui ont marqué la première audience", a déclaré l’organisation. Le 4 septembre 2009 s’était tenue l’audience préliminaire devant la Cour de district de Sabail, à laquelle les deux blogueurs avaient été conduits menottés, dans une salle suffisamment petite pour limiter le plus possible la présence du public et de la presse. Les avocats des accusés ont demandé que l’audience se tienne dans une salle plus grande, en vain. Le juge Araz Huseynov avait accordé une petite salle aux avocats des supposées "victimes", Ilkin Alizade, Vusal Mamedov et Babek Huseynov, l’affaire portant, selon ces derniers, sur des "secrets d’Etat". Les avocats des deux blogueurs ont déposé une demande de complément d’enquête, que le juge a rejetée. Pourtant, les prétendues victimes des deux blogueurs n’ont jamais présenté les blessures qu’elles disent avoir subies. Les avocats de la défense ont également demandé la reconnaissance de la violation de leurs droits car, durant leur détention, les deux blogueurs ont été empêchés de contacter leurs avocats. La requête a été rejetée. La défense soumettait des preuves supplémentaires de l’innocence des blogueurs (écoutes téléphoniques des portables des témoins de la scène et images de caméras de sécurité). Le juge les a refusées. "Si la Cour est impartiale,…elle doit prendre en compte les vidéos", a déclaré l’avocat de la défense, Isakhan Ashurov. Enfin, la libération conditionnelle de Adnan Hadji Zadeh et Emin Milli a été également refusée. Le refus d’accepter des preuves de la défense viole le droit à un procès équitable garanti par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, à laquelle est soumis l’Azerbaïdjan en tant que membre du Conseil de l’Europe. De même, le refus de libérer des accusés entre l’audience préliminaire et le procès viole l’article 9 alinéa 3 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Cet article dispose que la détention ne doit pas être la règle, lorsque d’autres mesures permettent d’assurer la comparution des accusés à l’audience. Par ailleurs, les parents des accusés ont demandé au juge Elnur Hasanov, le 14 septembre 2009, de pouvoir rendre visite à leurs enfants, alléguant de la violation du droit au respect de la vie privée et de la vie de famille protégé par l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Autre rejet, reportant cette nouvelle affaire au 17 septembre 2009. Le père de Adnan Hajizade, Hikmat Hajizade, a déclaré à ce sujet : "Le régime antidémocratique d’Azerbaïdjan fait de son mieux pour supprimer l’expression. Mais la nouvelle génération et la nôtre continuons la lutte pour la liberté d’expression." ------------------------------------------------------------ 25.08.2009 - Les deux blogueurs Adnan Hadji Zadeh et Emin Milli visés par une nouvelle accusation Les deux blogueurs Adnan Hadji Zadeh (Gadjizade) et Emin Milli, accusés de "hooliganisme" par les autorités, sont également accusés de "violences physiques volontaires", a annoncé leur avocat, Isakhan Ashurov, lors d’une conférence de presse, le 24 août 2009. Cette nouvelle infraction (article 127 du Code Pénal) leur fait encourir deux ans de prison en plus des cinq ans déjà encourus au titre de la charge de "hooliganisme" (article 221 du Code Pénal). Dans un rapport du 31 juillet 2009 remis au Conseil des droits de l’homme des Nations unies, le Comité des droits de l’homme a condamné le fait que le gouvernement d’Azerbaïdjan recoure systématiquement à l’infraction de "hooliganisme" (avec la diffamation) pour museler la liberté d’expression. -------------------------------- 11.08.2009 - La plainte des deux blogueurs rejetée La Cour de Bakou a rejeté, le 10 août 2009, la plainte des deux blogueurs Emin Mili et Adnan Hadji Zadeh (Gadjizade), contre le ministère de l’Intérieur, le Bureau du Procureur et la police de Bakou, pour non respect de la présomption d’innocence. Selon une source diplomatique, lors d’une réunion avec la délégation officielle de l’OSCE, le président Ilham Aliyev a qualifié les deux cyberdissidents de "hooligans". Arrêtés le 8 juillet dernier, les deux blogueurs n’ont toujours pas le droit de recevoir la visite de leurs proches. L’audience du 10 août a eu lieu à huis clos. L’avocat d’Adnan Hacji Zadeh, Isakhan Ashurov, a exprimé son souhait de faire appel de cette décision. -------------------------------------- 23.07.2009 - Les plaintes d'Adnan Hadji Zadeh et de Emin Mili rejetées Le 23 juillet 2009, la Cour de Bakou a rejeté les plaintes que les deux blogueurs emprisonnés, Adnan Hadji Zadeh (Gadjizade) et Emin Mili, ont déposé pour violation de leurs droits lors de leur arrestation, le 8 juillet 2009. L’audience a eu lieu à huit-clos, ce qui, selon les avocats des deux blogueurs, n’est pas fondé légalement. Les inculpés n’ont pas été entendus. Les deux avocats ont fait part de leur intention de porter l’affaire devant la Cour européenne de Strasbourg pour "détention illégale" et "violation des droits de l’homme par les forces de l’ordre". --------------------------------------- 20.07.2009 - Adnan Haji Zadeh et Emin Mili restent en prison Reporters sans frontières condamne la décision prise par la Cour d’appel de Bakou, le 20 juillet 2009, de maintenir Adnan Hadji Zadeh (Gadjizade) et Emin Mili en détention pendant deux mois. Les deux blogueurs sont incarcérés depuis le 8 juillet. “C’est un très mauvais signe pour la liberté d’expression en Azerbaidjan. Nous réitérons notre demande de libération d’Adnan Hadji Zadeh et Emin Mili, qui ont été arrêtés pour des raisons politiques et non criminelles”, a déclaré Reporters sans frontières, qui a fait parvenir une lettre au ministre azéri de la Justice, le 17 juillet 2009 en leur faveur. Lors de l’audience, seuls les avocats pouvaient être présents. Selon l’un d’entre eux, il s’agit d’une décision illégale. “Nous sommes bien décidés à faire appel devant la cour européenne des droits de l’homme”, a-t-il déclaré. Pour le père d’Adnan Hadji Zadeh, interrogé par Reporters sans frontières, “Adnan et Emin ont été punis en raison de leur engagement citoyen et des clips qu’ils diffusaient sur Internet”. Adnan Hadji Zadeh et Emin Mili risquent cinq ans de prison pour “hooliganisme”. ------------------ 16.07.2009 - Lettre ouverte de Reporters sans frontières au ministre de la Justice Monsieur Fikret Mamedov

Ministère de la Justice

Inshaatchilar ave. 1

Bakou

Azerbaïdjan


Paris, le 16 juillet 2009 Monsieur le Ministre, Reporters sans frontières, organisation internationale pour la liberté de la presse, souhaite attirer votre attention sur le cas des deux blogueurs, Adnan Hadji Zadeh et Emin Mili. Ils ont été arrêtés à Bakou le 8 juillet 2009 et accusés formellement deux jours plus tard d’“hooliganisme” (en vertu de l’article 222.1-0- du code pénal). Le juge Rauf Ahmadov de la Cour de Sabail les a placés en détention provisoire pendant deux mois, dans l’attente de leur procès. Notre organisation considère que cette accusation d’hooliganisme est infondée. De plus, le procès a été avancé sans raison et les blogueurs n’ont pas pu voir d’avocat avant l’audience pour préparer leur défense. Ces pratiques constituent des entraves sérieuses aux libertés fondamentales des deux hommes. Nous vous prions de consulter le procureur pour obtenir l’abandon immédiat des charges pesant contre les deux blogueurs. Peu avant leur arrestation, Adnan Hadji Zadeh et Emin Mili ont été agressé par deux hommes. Alors qu’elle les avait interpelé, la police a relaché les agresseurs Babek Huseynov et Vusal Mammadov, avant d’arrêter les blogueurs. La plainte que ces derniers ont déposée à la police pour l’agression, a disparu depuis. Adnan Hadji Zadeh est un vidéo-blogueur et membre du mouvement apolitique "OL ! Youth Movement" et Emin Mili est l’un des fondateurs du mouvement "The Alumni Network". Ce dernier souffre de différentes blessures, dont une à la jambe, et Adnan Hadji Zadeh a eu le nez cassé. Ils ne reçoivent pas les soins médicaux dont ils ont besoin. Nous souhaitons connaître les raisons réelles de l’arrestation d’Adnan Hadji Zadeh et Emin Mili, qui risquent une peine de cinq ans de prison. Une demande d’appel a été déposée le 13 juillet. Nous vous prions d’examiner le cas car l’abandon des poursuites judiciaires à l’encontre des deux blogueurs serait le signe fort d’un meilleur respect de la liberté d’expression et des droits de l’homme en Azerbaïdjan. Nous insistons sur le fait qu’en vertu de l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’homme, le droit à la liberté est soumis seulement à quelques exceptions légales qui autorisent l’arrestation dans des circonstances définies, telles que l’arrestation de personnes soupçonnées d’actes criminels, ou l’emprisonnement de personnes condamnées par un tribunal. Or, ce n’est pas le cas dans cette affaire. La Convention prévoit aussi le droit de recours rapide devant un tribunal pour déterminer la légalité de l’arrestation ou de la détention, le droit d’être jugé dans un délai raisonnable ou libéré dans le cadre de la procédure. Or, l’audience s’est déroulée dans de mauvaises conditions. Les blogueurs ont eu accès à leurs avocats mais les propos de ces derniers n’ont pas été pris en considération lors de l’audience. Les témoignages des proches des deux accusés, qui étaient sur les lieux lors de l’agression, n’ont pas été entendus. Selon ces derniers, la décision du juge est illégale car il n’existe pas de preuve suffisante pour prouver qu’Adnan Hadji Zadeh et Emin Mili sont coupables de quelque offense que ce soit. En espérant que vous tiendrez compte de notre requête, je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’expression de ma haute considération.” Jean-François Julliard

Secrétaire Général

Publié le
Updated on 20.01.2016