6000 euros d'amende pour Tamer Mabrouk, premier blogueur égyptien poursuivi par une entreprise
Organisation :
فرض غرامة من 6000 يورو على مدوّن لفضحه التلوث الصناعي
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Reporters sans frontières est scandalisée par la lourde amende à laquelle le blogueur Tamer Mabrouk a été condamné en appel, le 26 mai 2009, par la cour d'Al Zohor à Port-Saïd (est du Caire). Accusé de “diffamation” et d“outrage” par l'entreprise Trust Chemical Company, accusée de pollution dans l'un de ses articles, le blogueur a été condamné à verser 45 000 livres égyptiennes (environ 5 760 euros). Lors de son premier jugement, le 20 janvier, le juge l'avait déjà condamné à 340 euros d'amende.
“L'attitude de la justice est inacceptable. Le jugement en appel de Tamer Mabrouk a été conclu à la hâte et son cas n'a pas été réexaminé. L'amende qui lui est infligée est une insulte à la liberté d'expression. Il s'agit d'un clair moyen de le ruiner et de décourager toute prise de parole ou de position de sa part. Nous demandons l'abandon des charges à l'encontre du blogueur”, a déclaré l'organisation.
Lors de l'audience, aucun représentant de l'entreprise n'était présent. Le juge a confirmé le jugement de première instance. Selon son avocat, "Tamer Mabrouk a été jugé en fonction du droit des peines, alors qu'il n'a commis aucun crime. Cette décision est dangereuse car elle envoie un signe négatif pour l'avenir de la liberté d'expression. Nous avons décidé de faire une objection au tribunal, afin de d'annuler le jugement. "
En juin 2008, Tamer Mabrouk avait publié sur son blog (http://elhakika.blogspot.com) un article accusant Trust Chemical Company d'être à l'origine de la pollution de l'eau dans la région. Dans cet article, le blogueur dénonçait le fait que l'entreprise déverse des produits “hasardeux” dans le lac Manzalah et le canal de Suez, dont les effets sont inconnus sur les hommes comme sur les animaux. Il s'agit du premier blogueur égyptien poursuivi par une entreprise pour ses articles.
Vidéo (en arabe)
Témoignage de Tamer Mabrouk - Pourquoi l'article sur la pollution a-t-il suscité autant de problèmes ? “(...)D'importantes personnalités, comme le préfet de Port Saïd, sont parfaitement au courant des malversations de cette entreprise et de la pollution qu'elle occasionne. Mais elles s'interdisent d'évoquer le sujet, probablement en raison de pressions (...). La corruption est un problème majeur en Égypte et c'est ce qui permet de tout comprendre. Tout se passe dans la plus flagrante illégalité et les détournements de fonds publics sont aujourd'hui monnaie courante. (...) Dernièrement, un contrat a été conclu entre Trust Chemical Industries et l'Etat égyptien. L'une des clauses importantes de l'accord était la création de 2 500 emplois pour les travailleurs égyptiens. Or, cette condition n'a jamais été respectée et les autorités publiques n'ont effectué aucun contrôle.” - Votre article a été censuré, quelles ont été les réactions à ce sujet ? “Les autorités m'ont fait part de leur impuissance. Selon elles, l'entreprise a trop de pouvoir... Elles m'ont conseillé de m'adresser à la justice égyptienne.Or, mes tentatives en ce sens ont été vaines. J'ai donc décidé de mettre mon article en ligne. Mon travail portait sur une dénonciation sans concession de leurs méthodes, des circuits de la corruption, de la pollution, de leurs atteintes aux droits de l'homme et des licenciements abusifs qui étaient devenus fréquents au sein de l'entreprise. (...) J'ai moi-même intenté un procès contre l'entreprise, en réclamant sa fermeture pour “nuisances”. Le tribunal s'est déclaré incompétent. Parallèlement, Trust Chemical Industries m'a demandé de retirer ma plainte contre une somme d'argent. Face à mon refus catégorique, ils ont exigé la publication d'un démenti ou d'un rectificatif qui équivaudrait à des excuses de ma part. ” |
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Updated on
20.01.2016