Énième signal d’intimidation aux médias indépendants

Des amendements promulgués par le président azerbaïdjanais, le 3 février 2015, permettent au gouvernement d’obtenir encore plus facilement la fermeture de médias.

Le président azerbaïdjanais Ilham Aliev a promulgué, le 3 février 2015, des amendements à la loi sur les médias. Le ministre de la Justice pourra désormais saisir un tribunal pour obtenir la fermeture de tout média qui bénéficierait de financements étrangers, ou qui aurait été reconnu coupable de diffamation à deux reprises en moins d’un an. “Ce durcissement de la législation sur les médias n’est qu’une nouvelle manifestation de la dérive liberticide du régime d’Ilham Aliev, note Johann Bihr, responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale. On peut seulement s’étonner du caractère superflu de cette réforme, dans la mesure où les autorités n’hésitent généralement pas à piétiner leurs propres lois pour faire taire les voix critiques. Sans doute faut-il y voir un nouveau signal d’intimidation adressé aux derniers d’information indépendante.” Les nouveaux amendements ne font que durcir la législation existante : celle-ci prévoyait déjà la fermeture d’un média après trois condamnations pour diffamation (contre deux aujourd’hui), ou en cas de financement par un gouvernement étranger (désormais, tout financement provenant de l’étranger). Le principal journal d’opposition, Azadlig, déjà proche de l’asphyxie économique, s’estime particulièrement visé. Le président Ilham Aliev a lui-même introduit ces amendements au Parlement le 5 décembre 2014, le jour où la célèbre journaliste d’investigation Khadija Ismaïlova était emprisonnée dans une affaire montée de toutes pièces. Sans surprise, le texte a été adopté onze jours plus tard, sans aucune modification. Le 26 décembre, le bureau à Bakou de Radio Azadliq, le service azerbaïdjanais de Radio Free Europe / Radio Liberty (RFE/RL), a été perquisitionné et placé sous scellés. Le parquet a justifié ces mesures par une enquête visant le média en tant qu’”agent de l’étranger” - une expression popularisée dans la région depuis son retour dans la loi russe, en 2012, pour stigmatiser les ONG recevant des financements étrangers et suspectées d’“activités politiques”. L’Azerbaïdjan occupe la 160e place sur 180 pays dans le Classement mondial 2014 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières. Depuis cet été, les autorités ont redoublé d’énergie dans leur offensive contre les journalistes, les blogueurs et les ONG de soutien des médias. Pas moins de douze journalistes et blogueurs sont actuellement incarcérés du fait de leur activité d’information dans le pays. (photo : VestnikKavkaza)
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Updated on 20.01.2016