Syrie : RSF et SCM dénoncent les meurtres de deux correspondants de presse

Anas Alkharboutli, photojournaliste de l’agence de presse allemande DPA, est mort dans un bombardement le 4 décembre, à proximité de Hama, et Mustafa al-Kurdi, correspondant du média turc TRT et du site d’information en ligne Focus Aleppo a lui été tué par balles, par des soldats de l'armée syrienne, le 30 novembre à Alep, ville passée sous le contrôle des forces armées de l'opposition. Reporters sans frontières (RSF) et le Centre syrien pour les médias et la liberté d'expression (SCM) réclament une enquête indépendante sur les meurtres de ces deux journalistes : le ciblage des professionnels de l’information constitue un crime de guerre.

Dans la matinée du 4 décembre, une frappe aérienne sur la ville de Morek a tué le photojournaliste et correspondant de l’agence de presse allemande DPA Anas Alkharboutli. Ce professionnel des médias de 32 ans, récompensé en 2020 par le prix Bayeux des correspondants de guerre dans la catégorie jeunes journalistes, couvrait des affrontements entre les groupes d'opposition et l’armée syrienne dans cette localité située à une vingtaine de kilomètres au nord de Hama, dans le centre de la Syrie. Anas Alkharboutli “a documenté la guerre civile en Syrie dans un langage visuel unique”, a déclaré DPA dans un communiqué.

Quatre jours plus tôt, le 30 novembre, le correspondant du média public turc TRT, également employé du site local d’information Focus AlepMustafa al-Kurdi, avait été tué par balles. Selon nos informations, des soldats de l'armée syrienne ont ouvert le feu sur une voiture transportant le reporter à l’entrée du quartier d’Achrafieh, à Alep, la deuxième ville du pays localisée au nord du territoire.

RSF et SCM demandent l’ouverture d’enquêtes indépendantes pour identifier et traduire en justice les responsables de ces deux meurtres. Alors que les forces armées de l'opposition se sont emparées d’Alep, le 29 novembre, la population civile de cette région est visée de manière indiscriminée par la riposte militaire des forces du régime de Bachar al-Assad.

“Les meurtres odieux d’Anas Alkharboutli dans une frappe aérienne et de Mustafa al-Kurdi, par l’armée de Bachar al-Assad, et aux premiers jours des combats entre les forces armées d'opposition et l'armée du régime, nous font redouter d’autres crimes et violations contre les journalistes au cours de ce conflit qui s’annonce pour durer. Des enquêtes indépendantes doivent être ouvertes au plus vite pour déterminer les responsables de ces crimes et les traduire en justice. Si ces deux reporters ont été identifiés et ciblés en tant que journalistes, leurs meurtres constitueraient un crime de guerre, possiblement un de plus sur le compte de la dictature de Bachar al-Assad responsable de la mort de la grande majorité des 194 journalistes massacrés dans l'exercice de leurs fonctions depuis le début de la révolution de 2011 et de la guerre qui l’a suivi.”

Jonathan Dagher
Responsable du bureau Moyen-Orient de RSF

“Une presse libre est vitale pour toute démocratie, fermer les yeux sur le ciblage des journalistes revient à cautionner tacitement la violence. Sans obligation de rendre des comptes, le silence de la justice laisse place au grondement de la brutalité. Aucune partie à un conflit, quels que soient ses objectifs, ne peut se réfugier derrière le prétexte d’hostilités pour se soustraire de ses responsabilités en ciblant des journalistes, en négligeant leur protection ou en faisant preuve d'indulgence à l'égard des auteurs de ces actes. L'incapacité persistante de la communauté internationale à exiger des comptes à ceux qui ont pris des journalistes pour cibles en Syrie a créé un dangereux précédent, incitant d'autres pays à faire de même, de l'Ukraine à la Palestine.

Yara Bader
Directrice des programmes du SCM

La Syrie figure à l’avant-dernière place, 179 sur 180, du Classement 2024 de la liberté de la presse dans le monde établi par RSF.

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Score : 17,41
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