Bilan
Le bureau Assistance du secrétariat international de Reporters sans frontières et son homologue berlinois sont chargés de coordonner le soutien administratif, matériel et financier que l’organisation apporte aux journalistes et médias en difficulté.
Bilan de l’activité de soutien de RSF en 2014
En 2014, les deux bureaux ont accordé 216 bourses d’assistance pour un montant global de plus de 325 000 €, contre 163 000 € en 2013.
Si près de 80% de ces bourses ont été accordées à des individus, celles affectées au soutien de l’activité de médias ou d’organisations de défense de la presse et des journalistes constituent plus de 75% des dépenses d’assistance du secrétariat international de l’organisation.
L'AIDE AUX JOURNALISTES VICTIMES DE VIOLENCES ET DE LA RÉPRESSION
Près d’une centaine de bourses de soutien individuel (d’un montant moyen de 760 €) ont été versées par le secrétariat international de Reporters sans frontières en 2014 100
bourses de soutien individuel
ont été versées par RSF en 2014. Destinées à couvrir des besoins de première nécessité, des frais médicaux ou de justice ou à la mise en sécurité de journalistes menacés, leur répartition reflète les crises
politiques ayant embrasé les différentes régions du globe au cours de l’année.
L’exil face au chaos
Le chaos et la violence régnant en Libye et en Syrie, pays parmi les plus dangereux pour la presse, ont précipité le départ de nombreux journalistes professionnels ou citoyens au cours des derniers mois. Ils sont 43 journalistes professionnels ou non originaires de Libye à s’être résolus à l’exil en 2014, face aux menaces d’enlèvements ou de mort. Pris en étau entre séides du régime de Damas, groupes armés « d’opposition », membres du Front Al-Nosra, de l’EI ou d’autres milices extrémistes, plus de 300
journalistes et journalistes-citoyens syriens ont fui
les représailles systématiques dont ils font l’objet dans leur pays depuis le début du conflit. En 2014, Reporters sans frontières a attribué 27 bourses d’assistance à des Syriens et 22 à des Libyens, afin de leur permettre de faire face aux affres de l’exil.
La presse centrafricaine victime de la guerre civile
Le conflit qui a ravagé l’ensemble de la République centrafricaine n’a pas non plus épargné les médias. Tour à tour pris pour cible par les Seleka ou les Anti-balaka, nombre d’entre eux ont été vandalisés et pillés. Menacés, arrêtés arbitrairement, détenus dans des lieux secrets, les journalistes ont été aux premières loges du conflit. Quatre sont morts dans les violences, sans qu’il soit toujours possible d’identifier s’ils étaient visés pour leurs activités. D’autres ont dû se cacher ou fuir au cours de l’année 2014. RSF a accordé neuf bourses de soutien afin d’œuvrer à la sécurité de professionnels centrafricains menacés.
L’Azerbaïdjan, plus grande prison du continent européen pour les journalistes
Cette année, RSF s’est largement investie au soutien des journalistes azerbaïdjanais. Une vague de répression sans précédent s’est abattue sur les journalistes indépendants, blogueurs et net-citoyens du pays, faisant de l’Azerbaïdjan la plus grande prison pour les professionnels de l’information sur le continent européen. Le bureau assistance du secrétariat international de RSF et celui de la section allemande de l’organisation ont ensemble octroyé 23 bourses au cours de l’année à des journalistes azerbaïdjanais en exil ou emprisonnés ainsi qu’à certains de leurs proches.
Les graphiques ci-dessous illustrent la répartition des bourses en fonction de l’origine géographique des bénéficiaires (1) et de l’objet du soutien accordé (2).
1. Répartition géographique des bourses attribuées en 2014
2. Répartition des bourses 2014 en fonction de leur objet
SOUTENIR ET ACCOMPAGNER LES MÉDIAS ET ORGANISATIONS LOCALES DE DÉFENSE DE LA LIBERTÉ DE LA PRESSE ET DES JOURNALISTES
Au-delà de son action de soutien aux acteurs de l’information victimes d’exactions ou menacés, RSF s’est efforcée d’accompagner les journalistes poursuivant leurs activités, malgré les difficultés. Ainsi, comme l’illustre le graphique ci-dessous (3), les trois quarts des ressources financières du secrétariat général de RSF dédiées à l'assistance ont été mobilisés au profit de médias ou d’organisations de défense de la presse ou des journalistes.
3. Répartition financière des bourses 2014 en fonction de leur objet
Soutenir le travail des journalistes en période de crise
RSF a poursuivi son action de soutien à la sphère médiatique syrienne émergeante entreprise en 2013. Condamnés à l’exil, mais refusant d’être réduits au silence, nombre de journalistes syriens s’organisent, depuis la Turquie notamment. Malgré des moyens limités, ils s’efforcent de donner à voir l’ampleur des atrocités commises en Syrie depuis plus de quatre ans et de documenter le quotidien de leurs concitoyens, otages de la violence, qui tentent de construire un futur dans le pays.
En 2013 et 2014, RSF s’est engagée aux côtés de huit médias représentatifs de la nouvelle sphère médiatique syrienne. En 2014, elle a conduit trois sessions de formation à Gaziantep, en Turquie, pour leurs journalistes et leurs rédacteurs en chef, mobilisant 34% de ses fonds d’assistance. RSF a également alloué un soutien financier de 4 000 € à chacun des médias, afin de leur permettre d’acquérir l’équipement nécessaire à la poursuite de leurs activités.
Ciblée par les forces de l’ordre en marge de la répression du mouvement de la place Maïdan à Kiev, la presse ukrainienne a payé un lourd tribut durant les premiers mois de 2014. Face à l’urgence, le secrétariat international de RSF et sa section allemande ont joint leurs efforts afin de soutenir l’action de leur partenaire ukrainien, l’Institute of Mass Information (IMI).
Mobilisant leurs fonds d’assistance respectifs ainsi que les fruits d’un appel à dons organisé en février 2014, RSF a permis à son homologue ukrainien de mettre du matériel de sécurité à disposition des journalistes couvrant la situation à Kiev.
Plus de 1000 journalistes ont ainsi pu bénéficier de chasubles estampillées « PRESS », de lunettes et de casques de protection, ainsi que de masques . Le foyer de Kiev éteint, RSF a renouvelé son soutien à IMI en juillet 2014, lui permettant de constituer un stock de 37 gilets et 20 casques pare-balles qu’elle prête depuis lors à titre gracieux aux journalistes se couvrant le conflit dans l’est de l’Ukraine, et d’organiser une formation à la sécurité en période de conflit au profit de 20 journalistes.
Accompagner les médias dans les contextes les plus répressifs
En juillet 2014, RSF a soutenu le travail de GreatFire, organisation chinoise s’étant donnée pour mission de lutter contre la censure en ligne en Chine. Le soutien financier de RSF était destiné à permettre aux responsables de GreatFire de continuer leurs activités de référencement des sites bloqués en Chine et de contournement de la censure. La méthodologie de GreatFire a d’ailleurs inspiré l’opération « Collateral Freedom », menée par RSF à l’occasion de la journée mondiale contre la cyber-censure, le 12 mars 2015. RSF a également aidé le Tibet Post International à faire face à ses frais de fonctionnement et à se doter de nouvelles ressources humaines. Etablies en Inde, les équipes de ce site d’information indépendant s’efforcent de faire échec à la politique de censure du gouvernement de Pékin et de traiter de l’actualité et de la situation des droits de l’homme au Tibet.
L’organisation a également apporté son aide à des journalistes en ligne et des blogueurs vietnamiens, afin de leur permettre d’acheter du matériel nécessaire à la poursuite de leur activité d’information, malgré la répression et l’arbitraire du gouvernement.
Renforcer les capacités des organisations locales de défense de la liberté de la presse
En juin 2014, RSF a signé un contrat de coopération avec le Libyan Centre for the Defence of journalists. L’organisation a conduit par la suite deux formations au profit de leurs équipes : une première session consacrée à la méthodologie de documentation des violations de la liberté de l’information, l’autre relative à la recherche de fonds et à la gestion de projets.
RSF a également collaboré à la formation « Safer Journalists, better Journalism – Supporting Frontline Libyan Media » organisée par
l’Institute for War & Peace Reporting du 22 au 30 septembre à Tunis. Vingt-cinq journalistes, venus en majorité de Libye, y ont participé.
L’organisation a également animé quatre sessions de formation à la sécurité numérique en Côte d’Ivoire, à Hong Kong, en Turquie et en Ukraine. Les thèmes abordés portaient notamment sur l’utilisation des réseaux sociaux et d’Internet, la protection de ses données et communications. Les sessions turques et ukrainiennes ont été réalisées avec le soutien des partenaires locaux de RSF, Bianet et IMI. Une journée supplémentaire était alors dédiée à un membre de leur équipe afin qu’il puisse former d’autres journalistes professionnels ou citoyens à son tour.