Une chaîne de télévision condamnée pour offense au Président

Dans une lettre adressée à Christos Protopapas, ministre de la Presse et de l'Information, Reporters sans frontières (RSF) s'est étonnée de la condamnation, le 4 avril 2002, de la chaîne de télévision privée Extra Channel à une forte amende pour offense au président de la République Costis Stephanopoulos. Cette sanction, prononcée par le Conseil national de l'Audiovisuel, doit être paraphée par le ministre de la Presse et de l'Information. "Les Conseils de l'audiovisuel ont, dans les autres Etats de l'Union européenne, un rôle de régulation des médias audiovisuels, et non de juge de la diffamation, fonction qui devrait revenir aux seuls tribunaux. De surcroît, le montant de l'amende infligée à la chaîne de télévision Extra Channel est prohibitif, et de nature à contraindre l'ensemble des médias audiovisuels à l'autocensure sur les affaires sensibles", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de l'organisation. "Nous vous demandons de ne pas donner votre accord à cette sanction", a ajouté Robert Ménard. Selon les informations recueillies par RSF, le Conseil national de l'audiovisuel (ESR) a condamné, le 4 avril, la chaîne de télévision privée Extra Channel à 146 735 euros d'amende pour offense au président de la République Costis Stephanopoulos. Le reportage incriminé, diffusé le 31 janvier 2002, accusait le famille présidentielle d'avoir loué des propriétés à un homme d'affaires pour qu'il y ouvre des casinos. La diffusion du reportage est intervenue alors qu'un scandale politique éclatait sur la présence dans tout le pays de casinos illégaux. Le reportage, qui évoquait la possibilité d'une démission du Président, a été jugé comme une tentative de mettre en cause l'autorité du chef de l'Etat. L'ESR a sanctionné Extra Channel pour "diffusion de fausse information, langage erroné, tournage en caméra cachée" et pour avoir "semé la confusion chez les téléspectateurs". Reporters sans frontières rappelle que les journaux grecs sont régulièrement condamnés à payer de fortes amendes au titre d'une législation draconienne sur la diffamation et les délits de presse. Bien que les tribunaux ne prononcent plus de peines de prison pour des délits de presse, la législation prévoit toujours jusqu'à cinq ans d'emprisonnement pour "insulte" ou "outrage". En mars 2001, l'Union des rédacteurs d'Athènes, le principal syndicat grec de journalistes, avait demandé, dans une lettre ouverte adressée aux ministres de la Justice et de la Presse, l'abrogation de la loi imposant aux journaux de lourdes amendes en cas de "tort moral" infligé à un tiers. Dans un pays traditionnellement très procédurier, cette disposition permet depuis 1994 de condamner des organes de presse à des dommages et intérêts élevés.
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Updated on 20.01.2016