SERBIE : Un caricaturiste licencié puis réintégré par le quotidien Politika … à la demande du Premier ministre

Le quotidien serbe Politiko a licencié le célèbre caricaturiste du journal, Dusan Petricic, vendredi 30 septembre 2016 après sept ans de collaboration régulière. Reporters sans frontières (RSF) dénonce une censure politique intolérable menée par le gouvernement sur un grand quotidien du pays.

Pour justifier du renvoi du dessinateur, le rédacteur en chef de la publication, Zarko Rakic, a invoqué officiellement ses « tarifs trop élevés » et « des retards dans la livraison de son travail».


Or, le caricaturiste avait déjà été averti oralement qu’il devait cesser de critiquer aussi fréquemment le Premier ministre Alexandre Vucic, une demande contre laquelle il s’était élevé et qu’il avait refusé d’appliquer.


Devant le tollé général provoqué par le licenciement du caricaturiste, le journal a fait volte-face et Petricic s’est vu proposer de réintégrer immédiatement la publication.

L’association indépendante des journalistes de Serbie (NUNS) dénonce un « leurre » visant à étouffer la polémique.

Selon elle, il ne fait aucun doute que ces mesures sont orchestrées par le Premier ministre lui-même, lequel s’emploie à faire taire tous les journalistes critiques à l’égard du pouvoir.


RSF dénonce une censure intolérable pour des dessins politiques et la mainmise des autorités serbes sur les organes de presse du pays.

L’intervention du Premier ministre serbe dans les affaires internes d’un quotidien est particulièrement inquiétante, déclare Pauline Adès-Mével, responsable du bureau Europe-Balkans à RSF. Le fait que le cabinet du ministre se permette de s’immiscer dans le management d’un journal et que son rédacteur en chef s’exécute témoigne de collusions insupportables entre le pouvoir et certains médias du pays”.


Ironiquement, le travail du caricaturiste a déjà été cité à plusieurs reprises par le Premier ministre qui se défend de toute censure envers la presse.

En juillet 2016, le chef du gouvernement, également président du parti progressiste serbe (PNS) avait été jusqu’à organiser une exposition d’un nouveau genre, intitulée « mensonges non-censurés ».

Deux mille cinq cents vingt-trois caricatures, articles, tweets et émissions de télévision critiques à l’égard du gouvernement avaient été soigneusement sélectionnés par le parti progressiste et présentés dans une gigantesque galerie au cœur de Belgrade pour démentir une quelconque censure des autorités sur les médias.


La Serbie est classée 59e sur 180 pays, au Classement mondial de la liberté de la presse 2016 de Reporters sans frontières.

Publié le
Updated on 07.10.2016