Russie : entre deux manifestations pro-Navalny, le pouvoir continue à intimider les journalistes

Alors qu’une nouvelle journée de rassemblements en faveur de l’opposant Alexeï Navalny se prépare, la police mène des “visites préventives” et des perquisitions au domicile de journalistes et lance des procédures pénales. Reporters sans frontières (RSF) dénonce de graves abus et exhorte les autorités russes à cesser leurs attaques contre la presse.

A la suite des manifestations pour la libération de l’opposant politique Alexeï Navalny qui ont eu lieu le 23 janvier dernier, la police a perquisitionné, à Moscou, le logement du rédacteur en chef du site d’information de référence sur les abus policiers et judiciaires Mediazona, Sergueï Smirnov, et confisqué son disque dur. Plusieurs autres journalistes ont reçu des “visites préventives” à leur domicile, comme le rédacteur en chef de la chaîne de télévision indépendante Dojd Tikhon Dziadko ou encore la journaliste spécialiste de l’environnement et membre du syndicat des journalistes et des travailleurs des médias (JMWU) Sofia Rousova, également dans la capitale. Les pressions sur les médias se multiplient depuis le retour de l’opposant en Russie.


“Ces opérations d’intimidation orchestrées par les autorités sont totalement discrétionnaires et contre-productives, dénonce la responsable du bureau Europe de l’est et Asie centrale Jeanne Cavelier. La presse ne doit pas être la victime collatérale d’une chasse aux opposants, par ailleurs injustifiée. Nous demandons au pouvoir de mettre fin à ces menaces et de sanctionner les responsables de ces attaques contre les journalistes.”


La police s’est également rendue le 28 janvier chez la journaliste de Novaïa Gazeta  Elena Solovieva, qui avait couvert les rassemblements pro-Navalny du 23 janvier, afin de l’informer de poursuites pour “participation à un rassemblement non autorisé”. Même scénario à Nijni Novgorod, où des proches de la journaliste Margarita Mourakhtaeva ont appris le 27 janvier par la police qu’elle était poursuivie pour “participation” à un rassemblement qu’elle a couvert. La jeune femme travaille pour le site d’information local indépendant Koza Press fondé par sa mère, la journaliste Irina Slavina, qui s’est immolée en octobre dernier à la suite de pressions répétées des autorités locales.


Signe de la dérive inquiétante du pouvoir,  des dizaines d’affaires pénales ont également été ouvertes à Moscou. Pour avoir appelé à participer aux manifestations, au moins quatre journalistes sont poursuivis pour “violation des normes sanitaires”, dont l’éditeur de Mediazona Piotr Verzilov, le présentateur sportif Nikita Belogolovtsev et la reporter de la radio indépendante Echo de Moscou Tatiana Felgengauer. Le critique musical Artemy Troitsky a également été ajouté à cette liste de suspects, bien qu’il vive à Tallinn, en Estonie. S’ils sont déclarés coupables, tous ces journalistes risquent jusqu’à sept ans de prison ferme. 


Parallèlement à ces poursuites, la répression s’intensifie dans l’extrême-orient russe, où deux journalistes couvrant les manifestations contre l’arrestation du gouverneur local ont encore été condamnés ce 29 janvier pour “participation à un rassemblement non autorisé”.


La Russie occupe la 149e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2020 de RSF.

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Mise à jour le 30.01.2021