RSF exige une enquête irréprochable sur la mort en détention de Sattar Beheshti

Reporters sans frontières accueille avec la plus grande prudence l’ouverture d’un enquête par la justice iranienne sur la mort en détention, le 3 novembre 2012, du blogueur Sattar Beheshti. “Toute la lumière doit être faite sur les causes du décès de Sattar Beheshti. Les enquêtes annoncées ne doivent pas servir d’écrans de fumée ou se résumer à des opérations de communication destinés à contenir les dénonciations nationales et internationales qui ont suivi l’annonce du décès du blogueur. A ce jour, aux multiples zones d’ombre restantes, viennent s’ajouter des informations troublantes et contradictoires, de la part des différents responsables du régime, concernant son arrestation et l’inhumation de son corps. Reporters sans frontières exige à nouveau la mise en place d’une commission d’enquête indépendante sur la mort en détention de Sattar Beheshti”. Le 11 novembre 2012, le Conseil supérieur des droits de l'Homme a annoncé par communiqué "l’ouverture d’une enquête méticuleuse sur ordre spécial du chef du pouvoir judiciaire Sadegh Amoli Larijani”. “Les résultats de cette enquête seront rendus publics prochainement". Ce conseil est un organe étatique, placé sous la responsabilité du chef du pouvoir judiciaire. Ses membres représentent plusieurs branches du gouvernement et de l’appareil judiciaire : les ministères de la Culture et de l’Orientation islamique, des Renseignements, de la Justice, de l’Intérieur, des Affaires étrangères, mais aussi le chef de la police, le procureur général de la République islamique, le chef de la Haute Cour de Justice, le responsable des organisations des prisons du pays, le secrétaire général du Conseil, le vice-président de la Commission sur la sécurité nationale, ainsi que deux juges nommés par le chef du pouvoir judiciaire. Le 12 novembre 2012, à l’occasion de son point presse, Gholamhossein Mohseni Ejei, procureur général de la République islamique, a précisé plusieurs informations sur la mort du blogueur, notamment l’heure du décès, qui remonte au samedi 3 novembre, soit quatre jours après son arrestation. "Ce n’est pas normal que quelqu’un meure en prison quatre jours après son arrestation”, a déclaré le procureur général. Avant d’ajouter que “la cause du décès n’est pas connue, (…) l'autopsie du médecin légiste n’a pas révélé de choses particulières ni suspectes, si ce n’est le fait que l’on a pu voir, avant l’autopsie, des marques d'hématomes sur ses poignets, ses chevilles, ses jambes et sur ses épaules”. Le procureur a également confirmé l’existence d’une lettre envoyée par le blogueur au responsable de la prison après les 12 heures qu’il a passé en détention, le 31 octobre, dans le dortoir 350 de la prison d’Evin, pour se plaindre des coups et tortures infligés par la police. Il a cependant émis des doutes sur certains passages de ce courrier. Toujours selon le procureur, suite à l’avis de la juge des libertés, le blogueur aurait pu être libéré le 31 octobre après versement d’une caution. Les autorités tentent désormais de réunir des éléments pour étayer la cause d’une mort naturelle. Selon le procureur, le blogueur aurait déclaré à son arrivée à la prison, le 31 octobre, ‘qu’il avait le cœur lourd’, ainsi le médecin de la clinique d’Evin lui aurait administré un médicament mais constaté qu’il n’avait pas de problèmes cardiaques. Il lui aurait plutôt conseiller de consulter un neurologue. Cependant, d’après les informations réunies par RSF, Sattar Beheshti n’avait pas de problème de santé particulier. Le procureur général a déclaré que l’enquête se poursuivait afin de vérifier ce qui s’est passé entre le 1er et le 3 novembre 2012, lorsque l’accusé était entre les mains de la police, et de déterminer la cause de sa mort. Plusieurs responsables de la commission sur la sécurité nationale du Parlement, notamment son président, Allaedine Boroujerdi, ont déclaré qu’“il n’y avait pas de traces de torture sur le corps du blogueur” et que “la mort de Sattar Beheshti pourrait avoir une cause naturelle”. La commission de la sécurité nationale a annoncé mené sa propre enquête, et informera les parlementaires et la population une fois l'enquête terminée.
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Updated on 20.01.2016