RSF dénonce les arrestations massives de journalistes lors de manifestations en Egypte
Reporters sans frontières (RSF) dénonce l’arrestation de dizaines de journalistes étrangers et locaux dans différents quartiers du Caire le 25 avril dernier alors qu’ils couvraient des manifestations contre le gouvernement de Sissi, rapidement réprimées par un important dispositif policier.
Des dizaines de journalistes ont été arrêtés dans plusieurs quartiers de la capitale et autres provinces le 25 avril par les forces de l’ordre, parmi des centaines de manifestants, et emmenés dans des postes de police. Ils étaient venus couvrir une manifestation massive prévue contre le régime, dénonçant la situation économique, les droits de l’homme mais surtout la cession de deux îlots de la mer Rouge jugés stratégiques, Tiran et Sanafir, à l’Arabie saoudite. Cette manifestation tombait également un jour férié, à l’occasion de la commémoration de la restitution du Sinaï par Israël en 1982.
“Reporters sans frontières condamne ces vagues d’arrestations contre les journalistes qui souhaitent couvrir les manifestations dans le pays, a déclaré Alexandra El Khazen, responsable du bureau Moyen-Orient de l’organisation. Le gouvernement montre qu’il ne distingue pas les journalistes des manifestants, et semble vouloir éloigner les témoins gênants en s’en prenant aux médias. RSF demande aux autorités de cesser la violence policière contre les journalistes, et de veiller à ce que les responsables des agressions et exactions soient traduits en justice”.
Contactée par RSF, Noha Abdel wahab, directrice de l’unité de veille et de documentation de l’Observatoire des Journalistes contre la Torture (JATO), a déclaré qu’ils étaient une trentaine -ou même près de 40- journalistes interpellés sur place ou arrêtés ce jour-là entre le Caire et la ville de Gizeh en lien avec leur profession. Si une quinzaine de journalistes ont été libérés dans la soirée et le lendemain matin, l’Observatoire poursuit encore son enquête sur le terrain, et cherche à avoir plus d’information concernant dix reporters toujours détenus. Des journalistes français, norvégien, danois et égyptiens ont été arrêtés alors qu’ils couvraient ces manifestations.
Selon une source au Caire, la police s’était préparée trois jours avant les manifestations pour boucler certains points de rassemblement, et avait procédé à des perquisitions dans des lieux publics comme les cafés pour arrêter des opposants et militants des droits de l’homme.
Des journalistes étrangers ont été arrêtés sur la place Mesaha Square à Dokki, un quartier du Caire, et embarqués au commissariat par des policiers en civil et en uniforme, et par les forces spéciales alors même qu’ils avaient été identifiés en tant que journalistes. Leur matériel électronique a été confisqué. “En tant que journalistes, nous savions que nous étions des cibles” a déclaré cette même source.
Un caméraman de la BBC a même été violemment agressé au cours de la matinée dans le quartier de Nahya au Caire par des manifestants alors qu’il filmait une manifestation pro-Sissi sous le regard passif de la police.
Des milliers de personnes avaient déjà manifesté le 15 avril dernier pour protester contre la cession des deux îles à l’Arabie saoudite au cours d’un accord annoncé plus tôt en avril entre les deux pays lors de la visite au Caire du roi Salman.
L’Egypte est une des plus grandes prisons du monde pour les journalistes après la Chine, l’Erythrée et l’Iran. Le pays figure à la 159ème place (sur 180) du Classement 2016 de la liberté de la presse établi par l’organisation.