RSF demande à l'UE de prendre des sanctions contre les dirigeants du Zimbabwe

Dans une lettre adressée à Monsieur Josep Piqué I Camps, ministre espagnol des Affaires étrangères, représentant la présidence de l'Union européenne, à l'occasion de l'ouverture des négociations concernant la situation des droits de l'homme au Zimbabwe, le 11 janvier 2002 à Bruxelles, Reporters sans frontières (RSF) a demandé l'adoption de mesures fortes contre les responsables politiques de ce pays. "La situation des droits de l'homme au Zimbabwe, et notamment de la liberté de la presse, est catastrophique. L'Union européenne s'est dotée de mécanismes de sanctions en cas de violation massive des droits de l'homme dans un pays partenaire. Nous lui demandons aujourd'hui d'appliquer ces sanctions, non pas contre la population zimbabwéenne, mais contre les dirigeants du pays. Bruxelles peut notamment imposer des restrictions sur les déplacements des proches du Président et de son gouvernement", a indiqué Robert Ménard, secrétaire général de RSF. "Le Président et le gouvernement de Harare s'en prennent impunément aux journalistes locaux et étrangers. Les arrestations et les menaces sont incessantes, et la presse indépendante a de plus en plus de mal à informer l'opinion. Cela doit cesser et l'Union européenne doit aujourd'hui peser de tout son poids en ce sens", a ajouté l'organisation. RSF demande aux autorités de Bruxelles d'appliquer l'article 96 de la Convention de Cotonou qui prévoit des sanctions en cas de non-respect "des droits de l'homme, des principes démocratiques et de l'Etat de droit". En 2001, le Zimbabwe est devenu l'un des pays les plus répressifs de tout le continent africain en matière de liberté de la presse. Vingt journalistes locaux ont été interpellés et trois correspondants de la presse étrangère ont été expulsés du pays. Robert Mugabe, le président de la République, fait partie de la liste des trente-neuf prédateurs de la liberté de la presse dans le monde établie par RSF. Tout au long de l'année 2001, le Président et son gouvernement ont multiplié les déclarations fracassantes envers la presse. En septembre, par exemple, le ministre de l'Information, Jonathan Moyo, a accusé la BBC et les quotidiens britanniques The Guardian et The Telegraph de "travailler pour les services de renseignements britanniques". Il a ajouté que "dans l'intérêt du respect de la loi, les autorités compétentes vont traquer ces individus et stopper la jungle médiatique qu'ils essaient de créer". Le Daily News, seul quotidien indépendant du pays, est l'objet d'un véritable harcèlement de la part des autorités. Son directeur, Geoffrey Nyarota, a été arrêté à plusieurs reprises au cours de l'année. Le gouvernement et l'Union nationale africaine du Zimbabwe - Front patriotique (ZANU-PF, parti au pouvoir) ont multiplié les plaintes contre le journal, en exigeant des dommages et intérêts importants pour tenter d'asphyxier la publication. La situation économique difficile et les violences entre les fermiers blancs et les anciens combattants de la guerre de libération nationale n'ont fait qu'accroître la répression exercée par le gouvernement à l'encontre des journaux les plus critiques. Déjà, fin juin, les ministres des Affaires étrangères de l'UE avaient exprimé leur inquiétude face à la situation politique au Zimbabwe. Ils avaient notamment appelé les dirigeants du pays à respecter la liberté de la presse et l'indépendance de la justice. Quelques jours auparavant, le gouvernement des Etats-Unis avait reproché aux autorités "d'empêcher la presse de rapporter ce qui se passe à l'intérieur du pays". Une loi sur l'accès à l'information est actuellement en cours de lecture au parlement zimbabwéen. Ce texte prévoit notamment l'interdiction pour les journalistes étrangers d'exercer dans le pays. Il précise également que tous les professionnels de la presse doivent bénéficier d'une autorisation d'un an renouvelable accordée par une commission gouvernementale.
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Updated on 20.01.2016