Des sociétés privées vendent à des régimes autoritaires des technologies permettant de mener une surveillance en ligne à grande échelle de leur population. En Libye, en Egypte, au Maroc, en Ethiopie, ces technologies ont été et sont encore utilisées pour arrêter, enfermer et torturer, ce que ne peuvent prétendre ignorer les entreprises qui les fournissent.
Dans son
rapport daté du 28 avril 2014 le Groupe de travail des Nations unies sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises présente les résultats de son enquête, menée auprès de 153 entreprises dans 39 pays. Interrogées sur leur politique de protection des droits de l’homme, elles invoquent les mécanismes internes, telles que les codes de conduite ou les comités d’éthique. Pourtant, RSF a constaté que
ces mesures ne sont pas suffisantes pour empêcher la vente de technologie de surveillance à des régimes autoritaires.
Près de la moitié des entreprises interrogées lors de cette enquête ont souligné qu’une réglementation contraignante instaurée par les Etats seraient de nature à favoriser le respect des droits de l’homme dans le cadre de leur activité professionnelle (paragraphe 45).
Si un tel règlement existait, les entreprises exportatrices de technologies de surveillance seraient dans l’obligation de suspendre leur commerce avec certains pays utilisant leur technologie pour surveiller leurs citoyens et de rendre des comptes sur les matériels vendus. En décembre 2013, le prix Nobel de la paix, Joseph Stiglitz insistait lors du
forum “Entreprises et droits de l’homme” sur la nécessité de l’élaboration d’un accord international contraignant sur la responsabilité des entreprises qui permettrait de leur demander des comptes dans des cas de violations de droits de l’homme (p8).
Il faut maintenant passer des principes à l’action.
Dans la soumission écrite envoyée le 26 mai 2014 (jointe à ce communiqué) au Conseil des droits de l’homme, Reporters sans frontières demande la création d’une convention internationale relative à la responsabilité des entreprises en matière de droits de l’homme.
Celle-ci imposera aux Etats d’appliquer un contrôle strict de l’exportation des technologies de surveillance. Ils devront également mettre en place des recours pour les individus victimes de surveillance et des conséquences qui peuvent en résulter (arrestations, emprisonnement, violences physiques, tortures).
Reporters sans frontières avait publié en mars 2013
un rapport Ennemi d’Internet consacré à la surveillance dans lequel l’organisation désignait cinq pays (Syrie, Chine, Iran, Bahreïn, Vietnam) et cinq entreprises (Gamma, Trovicor, Hacking Team, Amesys, Blue Coat) “champions de la surveillance”. En avril 2013, l’organisation avait soumis au Groupe de travail des
recommandations sur la responsabilité des entreprises, pour la session de décembre 2013.