Radio Television Hong Kong (RTHK) : Patrick Li est-il directeur des programmes ou commissaire politique ?

Depuis sa prise de fonctions il y a trois mois, le directeur des programmes de Radio Television Hong Kong (RTHK), Patrick Li, a déjà censuré des centaines d'heures de contenus. Reporters sans frontières (RSF) appelle l’exécutif hongkongais à mettre immédiatement fin à ses fonctions et à cesser toute ingérence dans la ligne éditoriale du groupe audiovisuel public.

Depuis le 1er mars, jour de l’entrée en fonction de Patrick Li au poste de directeur des programmes de Radio Television Hong Kong (RTHK), au moins douze émissions ont été déprogrammées à la dernière minute et plus de 200 épisodes de la série documentaire Hong Kong Connection ou de l’émission d’actualité The Pulse ont été supprimés du compte Youtube du groupe audiovisuel public. Plus récemment, un épisode de l'émission politique LegCo Review incluant des images d'une veillée de commémoration du massacre de Tiananmen a été retiré des archives de RTHK pour avoir été diffusé « sans l’accord » de Patrick Li. Ce dernier, un bureaucrate sans aucune expérience dans le domaine des médias, a aussi menacé de réduire de moitié le salaire des employés ayant participé à la production de contenus qu’il jugerait impropres à la publication. 


« Nommé récemment à la tête de Radio Television Hong Kong (RTHK), Patrick Li est-il un directeur des programmes ou un commissaire politique ?, s’interroge Cédric Alviani, directeur du bureau Asie de l’Est de RSF. Son recrutement démontre l’intention du gouvernement d’instaurer un système de censure dans un média réputé jusqu’alors pour ses enquêtes audacieuses sur les politiques publiques. Nous appelons la cheffe de l'exécutif Carrie Lam, qui a nommé Patrick Li à ce poste, à immédiatement mettre fin à ses fonctions et à cesser une bonne fois pour toutes de s'immiscer dans les choix éditoriaux de RTHK, conformément à la loi fondamentale qui garantit la liberté de la presse à Hong Kong. » 


L’arrivée de Patrick Li a entraîné la démission d'au moins quatre employés importants : les producteurs exécutifs Fong Hiu-shan, Liu Wai-ling et Doris Wong et la journaliste primée Yvonne Tong. La journaliste Nabela Qoser, connue pour ses questions sans concessions aux membres du gouvernement, s’est aussi vu refuser le renouvellement de son contrat.


Une décision inédite : refuser le Prix de la liberté de la presse...


Sous la direction de Patrick Li, RTHK a aussi pris la décision inédite de refuser le Prix de la liberté de la presse qui lui a été décerné par l'Association des journalistes de Hong Kong. Ce prix récompensait un documentaire enquêtant sur une attaque de la mafia visant des manifestants pro-démocratie survenue en 2019. Encore plus étrange, le groupe audiovisuel a aussi récemment diffusé quatre fois par jour et vingt jours durant un talk-show en cantonais présenté par la cheffe de l’exécutif Carrie Lam elle-même et dans lequel elle a pu promouvoir ses politiques sans s’exposer aux questions des journalistes. 


Autrefois bastion de la liberté de la presse, la région administrative spéciale chinoise de Hong Kong a chuté du 18e rang en 2002 à la 80e place en 2021 dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF. La République populaire de Chine stagne pour sa part au 177e rang sur 180.

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Updated on 27.05.2021