Quand la police a recours à la violence pour faire taire les opposants

“ On n’a plus le droit à la parole en Tunisie. Quand on ose critiquer le régime dans les médias étrangers, on nous punit en nous agressant physiquement. De telles pratiques sont devenues monnaie courante. Plus besoin de jeter les gens en prison de nos jours », commente Radhia Nasraoui, jointe par Reporters sans frontières, dont le mari, Hamma Hammami, également opposant, vient d’être agressé à l’aéroport de Tunis, le 29 septembre. “ J’étais venue chercher mon mari à l’aéroport. Il revenait de France, où il avait donné le 25 septembre dernier une interview sur Al-Jazeera, dans laquelle il avait critiqué le régime, l’organisation de l’élection du 25 octobre et la situation des droits de l’homme en Tunisie. Ses propos avaient été repris sur France 24 le lendemain soir. “ J’étais venue en taxi, parce que les quatre roues de ma voiture avaient été crevées dans la nuit. A mon arrivée, j’étais un peu intriguée de constater un barrage de police filtrant les personnes entrant dans l’aéroport. Je me suis dit : “Ils sont un peu tendus, ils craignent peut-être que des militants ne viennent accueillir Hamma. Dans le hall, j’ai constaté qu’il y avait plus de policiers que de voyageurs, alors j’ai téléphoné à mon mari pour l’informer. Il m’a alors dit qu’il passait la douane et qu’il était suivi. “Ensuite, j’ai essayé à plusieurs reprises de l’appeler, mais en vain. L’aéroport commençait à se vider. C’est alors que j’ai vu Hamma arriver, la bouche en sang, les lunettes cassées, des ecchymoses sur le visage, entouré d’une vingtaine de policiers qui continuaient à le frapper et à l’insulter. J’ai hurlé, mais il n’y avait plus de touristes dans l’aéroport. Un policier s’est approché de moi, m’a arraché le portable des mains et l’a violemment lancé. “On est rentrés chez nous et on a appris que les autorités tunisiennes avaient déclaré à France 24 que Hamma était rentré chez lui sans encombre.” Radhia Nasraoui est avocate et défenseuse des droits de l’homme en Tunisie. Son mari, Hamma Hammami, ancien directeur du journal Alternatives, interdit par les autorités, est le porte-parole du Parti communiste des ouvriers tunisiens.
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Updated on 20.01.2016