Mort d’un grand prédateur de la liberté de la presse

Reporters sans frontières a appris la mort du dictateur nord-coréen Kim Jong-il, victime d'une crise cardiaque, le 17 décembre 2011, au cours d'un voyage en train. Annoncée par la télévision d'État le surlendemain, la mort du "Cher Leader" laisse sans réponse de nombreuses questions sur le futur de la liberté de la presse et de l'information dans le pays. "Kim Jong-il décédé, c'est un prédateur de la liberté de l'information qui disparaît. Désormais, toute notre attention va se porter sur son successeur annoncé, Kim Jong-un. Il est très difficile de prédire quelle sera la politique du troisième fils de Kim Jong-il en terme de libertés fondamentales. Ni ses études en Suisse, ni son très jeune âge, qui pourrait signifier son influençabilité, ne permettent d'en présumer. Les informations circulant à son sujet, et notamment sur sa sévérité à l'encontre des contrebandiers qui introduisent des supports médias étrangers, nous préoccupent fortement," a déclaré Reporters sans frontières. "Beaucoup dépendra de sa légitimité auprès de l’armée populaire et du Parti des travailleurs, qui sont les deux piliers du régime. Kim Jong-un n'a pas bénéficié de la même propagande nationale, ni de la même expérience que son père, qui avait été préparé à assurer le pouvoir dès les années 1970. Certains réfugiés ayant quitté la Corée du Nord avant 2009 ont affirmé ne pas avoir eu connaissance de son existence quand ils étaient encore dans le pays. Il n’est pas donc impossible que le régime décide de prendre des mesures politiques fortes voire radicales pour le légitimer auprès des plus hauts dignitaires du régime et de la population nord-coréenne", a ajouté l'organisation. Kim Jong-il se trouvait affaibli depuis une attaque cérébrale, en août 2008. Il avait depuis réduit quelque peu ses activités et ses apparitions publiques se faisaient plus rares. En septembre 2010, son troisième fils, Kim Jong-un, a été nommé général quatre étoiles des Forces armées populaires et élu membre permanent du Comité central et vice-président de la Commission militaire du parti, officialisant par là même la procédure de transfert de pouvoir. En 2011, la Corée du Nord, ennemi d'Internet, reste le pays le plus fermé au monde. Depuis dix ans, elle occupe alternativement l’une des deux dernières places du classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières. L’information n’est qu’officielle, au service de la propagande d’un régime anachronique et paranoïaque. En juillet dernier, Reporters sans frontières s’est rendue à Séoul, en Corée du Sud, pour enquêter sur la situation de la liberté des médias et de l’information en Corée du Nord, et a publié un rapport intitulé "Corée du Nord : les frontières de la censure". L'organisation constate l'augmentation des flux d’informations vers le pays, favorisés par les stations de radio étrangères mais aussi par les organisations qui envoient du matériel et du contenu multimédia. Depuis 2009, l’organisation apporte son soutien à des radios, basées à Séoul et opérées par des transfuges, telles que Free North Korea Radio, Radio Free Chosun et Open Radio for North Korea, qui constituent les principales sources d’information indépendantes pour la population nord-coréenne. Au milieu des années 2000, ces radios émettant pour la population nord-coréenne se sont établies à Séoul. Elles sont les premières radios opérées par des transfuges nord-coréens à diffuser leurs programmes vers le nord. Le 16 février 2011, dans le cadre d’une campagne contre le dictateur nord-coréen, classé parmi les "prédateurs de la liberté de la presse", Reporters sans frontières et plusieurs ces médias indépendants avaient tenu une conférence de presse à Séoul à la date de l’anniversaire de Kim Jong-il. La campagne visait à inciter les autorités et la société civile sud-coréennes à renforcer leur soutien aux radios nord-coréennes qui s’efforcent de briser le mur de la propagande et du contrôle politique.
Publié le
Updated on 20.01.2016