Mort de Mohamed Monir et Saleh Al-Shehi : un signal d’alarme pour l’Egypte et l’Arabie saoudite
Après la mort du journaliste égyptien Mohamed Monir, qui a contracté le Covid-19 en prison, et celle de Saleh Al-Shehi, mort deux mois seulement après sa libération précipitée, Reporters sans frontières (RSF) appelle les autorités égyptiennes et saoudiennes à libérer tous les journalistes détenus afin qu’une catastrophe soit évitée.
Ces deux éminents journalistes sont décédés à quelques jours d’intervalle. L’Egyptien Mohamed Monir et le Saoudien Saleh Al-Shehi ont pour point commun d’avoir perdu la vie quelques semaines après avoir été libérés de prison - sans préavis - par la justice de leur pays. Le premier est mort le 13 juillet, le second le 19.
Mohamed Monir a été libéré le 2 juillet alors que sa détention préventive avait été renouvelée pour deux semaines cinq jours auparavant. La justice l’accusait de “diffusion de fausses nouvelles”, “abus d’utilisation des réseau sociaux” et “participation à un groupe terroriste”. Il était intervenu sur la chaîne qatarie Al Jazeera (interdite en Egypte) et avait partagé sur sa page Facebook une vidéo montrant une perquisition de son domicile. Saleh Al-Shehi a pour sa part été libéré le 19 mai, alors qu’il purgeait toujours une peine de cinq ans d’emprisonnement pour “outrage à la cour royale”, pour avoir parlé de la corruption des élites dirigeantes lors d’une émission diffusée sur la chaîne locale Rotana.
En retraçant la chronologie qui a suivi leur sortie de prison, on constate que leur état de santé s’est dégradé en peu de temps. Dans le cas de Mohamed Monir, sa famille est formelle : le journaliste a commencé à afficher des symptômes avant sa libération. Sa fille Sarah détaille le parcours de soins de son père défunt : à partir du 28 juin, Mohamed Monir a été transféré d’hôpital en hôpital pour y passer des examens et soumis au test du Covid-19 à trois reprises jusqu’à être déclaré positif le 8 juillet.
Quant à Saleh Al-Shehi, les circonstances de sa mort sont plus floues mais suscitent suffisamment d’interrogations pour attendre des explications des autorités saoudiennes. En effet, le 26 juin, au moment où la famille du journaliste a officiellement annoncé son hospitalisation, celui-ci était déjà en soins intensifs depuis plus de dix jours, soit moins d’un mois après sa sortie de prison. RSF a réclamé une enquête internationale indépendante pour déterminer le degré de responsabilité de l’administration pénitentiaire. Quelles que soient les causes de sa disparition prématurée, Saleh Al-Shehi n’aura connu que la détention au cours des deux dernières années, du fait de sa condamnation arbitraire.
“La mort de Mohamed Monir et Saleh Al-Shehi en cette période de pandémie témoigne de l’absolue nécessité de libérer les journalistes pour leur éviter un sort tragique, déclare Sabrina Bennoui, responsable du bureau Moyen-Orient à RSF. A l’approche de l’Aïd vendredi, nous appelons les autorités égyptiennes et saoudiennes à se saisir de cette occasion pour sauver les journalistes des prisons surpeuplées. Évitons la catastrophe, avant qu’il ne soit trop tard.”
Actuellement, l’Egypte et l’Arabie saoudite sont les pays qui emprisonnent le plus les journalistes au monde, derrière la Chine. RSF a identifié 30 journalistes détenus en Égypte et 33 en Arabie saoudite.
L’Egypte et l’Arabie saoudite occupent respectivement la 166e et la 170e place au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.