Maroc : Hajar Raissouni, nouvelle victime de l'acharnement judiciaire contre les journalistes
Reporters sans frontières (RSF) appelle à la libération immédiate et sans condition de la journaliste marocaine Hajar Raissouni, arrêtée depuis le 30 août 2019, au prétexte d’une affaire de mœurs.
Le procès d’Hajar Raissouni, reporter du quotidien arabophone Akhbar Alyaoum, un des derniers #FREEHAJARSIGNEZ LA PETITIONjournaux indépendants au Maroc, s’est ouvert ce lundi 9 septembre devant le tribunal de première instance de Rabat. Arrêtée pour avortement illégal le 30 août dernier et maintenu en détention depuis, la journaliste dénonce des “accusations fabriquées” et une “affaire politique”, liée notamment à ses récents articles sur les détenus du mouvement social du "Hirak". Dans une lettre publiée par son journal, la journaliste évoque avoir été interrogée en garde à vue sur son oncle, un idéologue islamiste connu et un éditorialiste réputé pour sa plume critique.
Au Maroc, les affaires de moeurs sont souvent utilisées comme des moyens de pression contre les personnes considérées comme gênantes pour le pouvoir. Cette arrestation intervient alors que l’influent éditorialiste et directeur du journal Akhbar Alyaoum, Taoufik Bouachrine, fait déjà lui-même l’objet d’une virulente campagne de diffamation et a écopé d’une peine de 12 années de prison pour des violences sexuelles qu’il a toujours niées. RSF a, à maintes reprises, dénoncé l’acharnement judiciaire à son encontre.
Le procès de Hajar Raissouni, poursuivie pour des faits qui débordent le cadre de sa pratique de la profession, rappelle également les cas emblématiques des journalistes Ali Anouzla et de Maati Monjib, qui doivent répondre à des accusations “d’apologie du terrorisme”, “incitation à commettre des actes terroristes” et “atteinte à la sécurité de l’Etat”, alors qu’ils n’ont fait qu’exercer leur métier. Ces deux procès durent depuis cinq ans.
“Nous condamnons fermement l’immiscion dans la vie privée des journalistes et l’utilisation d’informations personnelles pour porter atteinte à leur réputation et à celle des médias pour lesquels ils travaillent, déclare Souhaieb Khayati le directeur du bureau Afrique du Nord de RSF. Nous exhortons les autorités marocaines à abandonner les charges contre Hajar Raissouni et à respecter l’article 24 de la constitution qui dispose que toute personne a droit à la protection de sa vie privée.”
Le Maroc se situe à la 135e place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse en 2019.