Les parlementaires européens renforcent la protection des lanceurs d’alerte

Les eurodéputés de la commission des Affaires juridiques ont voté, mardi 20 novembre, la mise en place d’une protection des lanceurs d’alerte à l’échelle européenne. Ces derniers pourront transmettent directement leurs informations aux médias sous certaines conditions. C’est maintenant au tour du Conseil de l’UE d’adopter sa position.

Reporters sans frontières (RSF) salue le texte adopté par la commission des Affaires juridiques du Parlement européen (22 voix pour, 0 contre, 1 abstention), qui apporte des améliorations substantielles à la proposition de directive initiale de la Commission européenne sur la protection des lanceurs d’alerte.


« Les parlementaires ont nettement élargi les possibilités pour les lanceurs d’alerte de s’adresser directement aux médias sans effectuer au préalable un signalement interne ou externe, s’est félicité Julie Majerczak, représentante de RSF auprès des institutions européennes. C’est un point essentiel pour leur protection mais aussi pour la liberté d’information et le droit du public d’accéder à des informations d’intérêt général. Le rôle des lanceurs d’alerte dans la révélation d’atteintes à l’intérêt général n’a eu de cesse de se vérifier ces dernières années comme l’ont montré les Panama Papers, les LuxLeaks ou encore l’affaire du Médiator en France. Il est, par conséquent, indispensable de protéger les lanceurs d’alerte quand ils alertent l’opinion publique à travers les médias de la manière la plus large possible. Le recours, par un lanceur d’alerte, à un intermédiaire qu’est le journaliste, qui est en mesure de vérifier et recouper les faits que lui rapporte le lanceur d’alerte, doit même être perçu comme un signe de la bonne foi de ce dernier».


Le texte voté en commission des Affaires juridiques permet au lanceur d’alerte de se tourner directement vers la presse s’il a des motifs raisonnables de croire qu’il ne peut pas utiliser les canaux de signalement interne et/ou externe à cause, par exemple, d’un danger manifeste ou imminent, d’une atteinte à l’intérêt public, des circonstances particulières de la situation, comme la collusion, l’implication des autorités compétentes, le risque de destruction des preuves… De plus, ces conditions ne sont pas exhaustives. La proposition de la commission européenne était particulièrement restrictive, elle ne permettait d’alerter directement les médias qu’en cas de danger imminent ou de préjudice irréversible.


RSF regrette toutefois que le texte limite les actes qui peuvent être dénoncés par un lanceur d’alerte aux actes illégaux et aux abus de droit. Cela affaiblit sérieusement la protection des lanceurs d’alerte. La directive devrait couvrir de façon générale les actes qui menacent ou portent préjudice à l'intérêt général.


Par ailleurs, RSF se félicite que les éléments suivants aient été renforcés : 

-Un champ d’application large avec une liste indicative et non exhaustive des législations européennes dont les violations peuvent être signalées par un lanceur d’alerte.

-La protection des lanceurs d’alerte mais également des collègues qui l’ont aidé ainsi que des journalistes.

-Une protection accrue contre les mesures de représailles, notamment contre les procédures-bâillons.


La balle est maintenant dans le camp du Conseil de l’UE, représentant des Etats membres. RSF appelle le Conseil à intégrer les avancées votées par les eurodéputés, en particulier à protéger les lanceurs d’alerte quand ils alertent l’opinion publique à travers les médias. Il est également essentiel que le Conseil arrête sa position d’ici la fin de l’année, de manière à permettre une adoption définitive de la directive avant les élections européennes.

Publié le
Updated on 20.11.2018