Le diplomate chinois Lu Shaye, pourfendeur de la presse canadienne, nommé ambassadeur en France

Après deux années en poste au Canada, Lu Shaye, doit prochainement prendre ses fonctions comme ambassadeur de Chine en France. Reporters sans frontières (RSF) rappelle qu’un diplomate ne doit pas tenter d’intimider les médias du pays où il réside.

Reporters sans frontières (RSF) s’inquiète de l’arrivée prochaine de Lu Shaye à l’ambassade de Chine en France, en remplacement de l’ambassadeur actuel Zhai Jun. Le diplomate, âgé de 54 ans et qui parle couramment français, exerce depuis 2017 la fonction d’ambassadeur de Chine au Canada et s’est taillé la réputation d’ennemi des journalistes, qu’il accuse systématiquement de « relayer une image négative de la Chine » dès que leurs articles lui déplaisent. Un style peu diplomatique qui tranchera avec la relative discrétion de son prédécesseur.


« Un diplomate ne doit pas tenter d’intimider les médias du pays dans lequel il est posté et encore moins leur donner des instructions, rappelle Cédric Alviani, directeur du bureau Asie de l’Est de RSF. Le fait même que Lu Shaye soit encore ambassadeur en dépit de ses coups d’éclat est révélateur de l’attitude agressive et décomplexée avec laquelle Pékin tente d’imposer sa propagande hors de ses frontières. »


A peine arrivé en poste à Ottawa, en 2017, Lu Shaye n’a pas hésité à s’en prendre au gouvernement du Premier ministre Justin Trudeau, estimant qu’il ferait mieux de « négocier un accord de libre-échange avec Pékin plutôt que de se prosterner devant les journalistes canadiens préoccupés par les droits humains en Chine. » Plus récemment, il a accusé les médias canadiens de relayer “l’égotisme occidental et la suprématie de la race blanche” et a dénigré leur travail en considérant qu’ils étaient moins bien placés que le peuple chinois pour juger du développement de la Chine. Il s’est aussi régulièrement plaint du caractère selon lui « biaisé » et « calomnieux » des articles dénonçant les persécutions des Ouïghours dans la presse canadienne.


Lu Shaye n’est pas le premier dignitaire chinois à s’attaquer aux médias étrangers. L’ambassadeur de Chine en Suède, Gui Congyou, s’est lui aussi lancé ces dernières années dans une véritable croisade contre les journalistes. En juin 2016, le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi, en visite officielle au Canada, avait aussi publiquement qualifié « d’irresponsables » les questions d’une journaliste portant sur les droits humains en Chine.


La Chine est l’une des plus grandes prisons du monde pour les journalistes, avec au moins 111 d’entre eux derrière les barreaux dans des conditions qui laissent craindre pour leur vie. Dans le Classement mondial RSF de la liberté de la presse 2019, le pays est classé au 177e rang sur 180.

Publié le
Mise à jour le 17.06.2019