La répression envers le centre d’information Hablemos Press s’accentue

Une campagne d'intimidation visant le centre d’information Hablemos Press semble faire écho à ses prises de position gênantes pour le gouvernement cubain. Quatorze de ses correspondants ont reçu des menaces et dix ont été interpellés au moins une fois au cours des trois derniers mois. Le sort des journalistes dissidents à Cuba ne cesse de s’aggraver. Une nouvelle vague de répression s’est abattue sur quiconque tente de donner son opinion dans un régime où l’absence de libertés est la règle. Hablemos Press illustre particulièrement bien cette situation. Le nombre élevé d’arrestations et de courtes détentions infligées à ces journalistes à pour but de les réduire au silence. Les mesures économiques et sociales rendues publiques lors du VIe Congrès du Parti communiste cubain en avril 2011, doivent être accompagnées d’avantage d’ouverture sur les questions des droits de l’homme et de la démocratie. Reporters sans frontières exige du gouvernement cubain la légalisation d’une presse indépendante, hors du contrôle de l’État, la fin de la répression pour délits d’opinion, l’accès pour tous les Cubains à un Internet non filtré et l’abrogation des lois répressives qui vont à l’encontre de la liberté de presse. Les autorités cubaines doivent également honorer leurs engagements internationaux en ratifiant les deux pactes de l’Onu relatifs aux droits civils et politiques, qu’elles ont signés en 2008. D’après le directeur du centre d’information Hablemos Press, Roberto Jesús Guerra Pérez, la situation a commencé à se détériorer lors du VIe Congrès du Parti communiste quand des agents de sécurité de l’Etat ont interdit aux journalistes de sortir de chez eux, pendant toute la tenue du congrès. "C’est une guerre psychologique. Avec des menaces de mort, des incitations à quitter le pays avec nos familles, des détentions incessantes et des interrogatoires, parfois de plus de quatre heures, on cherche à nous faire taire", a déclaré Guerra Pérez. Une disposition de la loi 88 de "Protection de l’indépendance nationale et l’économie cubaine", connue sous l’appellation de "loi bâillon", punit sévèrement par des peines de prison de deux à huit ans, ceux qui collaborent avec des médias étrangers s’ils causent préjudices graves à l’économie nationale. D’après une information confiée à Reporters sans frontières par Guerra Pérez, c’est sur ce fondement juridique que de nombreux journalistes indépendants ont été arrêtés et détenus, comme cela avait été le cas en 2003 lors du Printemps noir. Calixto Ramos Martínez Arias, correspondant d’Hablemos Press depuis 2009, appréhendé et déporté à plusieurs reprises de La Havane à la ville de Camagüey en raison de son travail en 2010, a été détenu à deux reprises depuis mai 2011. Lors de sa dernière interpellation, le 16 mai dernier, il a passé 75 heures en garde de vue sur ordre d’un officiel de la sécurité de l’Etat sans justification. Après avoir détruit sa carte d’identité, ce dernier l'a menacé de mort, soulignant qu’il lui tirerait dans la tête s’il retournait à l’unité de police. Jorge Alberto Liriano Linares, correspondant à Camagüey, a été violemment agressé le 3 juin 2011 par des agents de l’Etat alors qu’il couvrait un rassemblement organisé par l’Union pour les droits de l’homme à Carlos Manuel de Céspedes. Il souffre de contusions aux côtes et lacérations au corps et au visage. Arrêté, il a été transféré à l’unité de sécurité de l’Etat où il a été détenu pendant huit heures. Le journaliste n’a pas obtenu d’assistance médicale et a affirmé avoir été exposé à des "tortures psychologiques et des maltraitances systématiques". Carlos Ríos Otero, appréhendé deux fois, et Sandra Guerra, détenue à son domicile pendant plus de 48 heures sous la garde d’une vingtaine d’agents, ont été menacés par des agents de l’Etat et de la police nationale à La Havane. Le 9 avril 2011, des pierres ont été lancées en direction du domicile du journaliste Jaime Leygonier Fernández, suite à la publication d’un article dans lequel il critiquait fortement le régime. Yoandris Gutiérrez Vargas, Enyor Díaz Allen et Raul Alas Márquez ont tous trois été détenus à deux reprises. Le premier, le 17 et 22 juin dernier, alors qu’il suivait la grève de la faim du dissident Jorge Cervantes à Santiago de Cuba. Díaz Allen à Guantanamo où il a également été agressé par des sympathisants du régime lors du VIe Congrès du Parti communiste. Et Alas Márquez à Cielo de Avila. La journaliste indépendante Magaly Norvis Otero Suárez, collaboratrice du centre d’information Hablemos Press et de Radio Martí, qui tient également un blog dénonçant les violations des droits de l’homme dans l’île ainsi que les arrestations arbitraires, a été insultée le 7 juin 2011. Quatre prisonniers, Alexander Suárez Torres, Carlos Amir Cárdenas Cartava, Jorge Félix Otero Morales et Ramón Arias Acosta, ont vu leurs conditions de détention se détériorer en raison de leur collaboration avec Hablemos Press. Suárez Torres et Amir Cárdenas ont été transférés de La Havane aux prisons de Camagüey. Otero Morales et Arias Acosta sont confinés dans des cellules de punition pour avoir divulgué des informations à l’agence. Enfin, Guillermo Fariñas, cyberjournaliste dissident cubain et lauréat du prix Sakharov 2010, décerné par le Parlement Européen, a été interpellé, la dernière fois, le 27 mai 2011. Il est resté en garde à vue 12 heures durant avec onze autres membres de l’opposition dans les locaux de l’unité des opérations policières de la province. La liberté d’informer est un droit toujours dénié au peuple cubain. Plusieurs journalistes ont été forcés à quitter le pays. A l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés, le 20 juin 2011, Reporters sans frontières a rendu hommage à ces journalistes qui, en continuant leur travail malgré l’exil, font échec à ceux qui les ont expulsés, en voulant les réduire au silence. Dans son rapport intitulé, "Condamnés au départ, pas au silence – Le combat des médias en exil", l’organisation a donné la parole à des journalistes en provenance de tous horizons, dont Cuba. Reporters sans frontières a ainsi voulu participer à faire entendre leur voix.
Publié le
Updated on 20.01.2016