La loi sur la lustration en grande partie invalidée par la Cour constitutionnelle : Reporters sans frontières se réjouit

Lire en français la tribune de Rsf Lire en polonais la tribune de Rsf La Cour constitutionnelle de Pologne a partiellement invalidé, le 11 mai 2007, une loi très controversée de “décommunisation”, destinée à vérifier le passé de quelque 700 000 Polonais. Plusieurs articles sur les 46 contestés par l'opposition social-démocrate ont en revanche été déclarés conformes à la Constitution. Parmi les articles invalidés figurent ceux qui concernaient les journalistes, les directeurs d'école et les recteurs d'université. “Reporters sans frontières exprime sa satisfaction à la suite de la décision rendue. Il faut maintenant que celle-ci soit rapidement publiée dans le Journal Officiel polonais pour la rendre effective”, a déclaré l'organisation de défense de la liberté de la presse. Le 24 mars dernier, Gazeta Wyborcza avait publié une tribune de Reporters sans frontières, intitulée “Du passé comment faire table rase ?”, dans laquelle l'organisation de défense de la liberté de la presse mettait en garde contre le procédé créant “une catégorie de citoyens privés de liberté d'expression avec la bénédiction de l'Etat”. Figure légendaire de l'opposition anticommuniste et élu au Parlement européen en 2004, Bronislaw Geremek, qui s'était opposé à cette loi, a déclaré, à la suite de l'annonce du verdict qu'il “n'y a ni vainqueurs, ni vaincus, seulement des citoyens qui ont été protégés”, tout en constatant que “la Pologne reste un Etat de droit”. Le texte, entré en vigueur le 15 mars 2007, obligeait les professionnels des médias à déclarer, sous peine de perdre leur poste et d'être frappés d'une interdiction de publier de 10 ans, s'ils avaient ou non collaboré avec la police secrète du temps du régime communiste, qui s'est écroulé en 1989. La Cour a tenu à se prononcer avant le 15 mai, date limite pour déposer ces déclarations. La très grande majorité des Polonais concernés avaient préféré attendre le jugement avant d'envoyer leur formulaire à l'Institut de la mémoire nationale (IPN), qui gère les archives de la police secrète (SB). La décision apparaît comme un revers de taille pour les frères jumeaux conservateurs Lech et Jaroslaw Kaczynski, respectivement Président et Premier ministre, qui avaient fait de cette loi de “décommunisation” une des priorités de leur mandat. Craignant la décision de la Cour, ils ont tout tenté ces derniers jours pour empêcher son échéance. Ils ont ainsi ordonné de rechercher dans les archives de l'IPN le moindre élément permettant de discréditer les juges de la Cour. Pour ne pas prêter le flanc à des accusations de conflit d'intérêts, le président de la Cour avait décidé de suspendre deux juges, dont les noms étaient inscrits dans les archives de la SB comme “contacts” informels, mais rayés ensuite pour refus de collaborer, information que le quotidien Fakt a délibérément passée sous silence.
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Updated on 20.01.2016