La directrice d’un quotidien algérien en grève de la faim pour sauver son journal
Hadda Hazem, directrice du quotidien Al-Fadjr, a entamé une grève de la faim le 13 novembre, pour protester contre la « mise à mort programmée » et l’étranglement financier de son journal par les autorités algériennes. Reporters sans frontières (RSF), l'Association Vigilance pour la Démocratie et l'Etat civique, le Centre de Tunis pour la Liberté de la Presse (CTLP) dénoncent une sanction qui asphyxie progressivement un média et soutiennent Hadda Hazem dans son combat.
Mise à jour - pour des raisons de santé, Hadda a arrété sa grève de la faim lundi 20 novembre.
Depuis plus de trois mois, le quotidien généraliste arabophone Al-Fadjr ne reçoit plus aucune publicité institutionnelle, qui s’avère être une des principales sources de revenus des médias en Algérie. Le journal est privé de publicité depuis une intervention d’Hadda Hazem sur France 24 le 9 août dernier. La journaliste avait alors commenté et critiqué une lettre du président Abdelaziz Bouteflika adressée à son Premier ministre. Depuis, l’ANEP, l’agence étatique chargée de la distribution de la publicité publique a retiré sa page publicitaire du journal. Étranglé financièrement, Al-Fadjr a du baisser son tirage, réduire son nombre de pages, renoncer à sa version papier pour ne plus paraître que sur le web et s’endetter pour payer les salaires de ses journalistes. C’est pour protester contre “la décision des autorités de la punir”, qu’Hadda Hazem a décidé de commencer une grève de la faim.
“Je me bats depuis plus de quinze ans pour la liberté et l’indépendance de la presse, a expliqué Hadda Hazem à RSF, l'Association Vigilance pour la Démocratie et l'Etat civique et au CTLP avant d’ajouter: aujourd’hui, les pressions sont devenues insoutenables et cette grève de la faim entamée au péril de ma vie, est devenue la seule issue”.
« Nous dénonçons une sanction qui revient à condamner à mort le journal Al-Fadjr par asphyxie et qui amène sa directrice, Hadda Hazem, à recourir à des moyens extrêmes pour faire entendre sa voix, déclarent RSF, l'Association Vigilance pour la Démocratie et l'Etat civique et le CTLP. Al-Fadjr est un journal reconnu, le premier à avoir été créé en Algérie par une femme journaliste, qui le dirige depuis maintenant dix-sept ans contre vents et marées. Nous appelons les autorités algériennes, qui fragilisent chaque jour un peu plus les médias privés, à lever cet embargo économique au plus vite. »
En 2014 déjà, la société publique chargée de l’impression d’Al-Fadjr avait cessé d’imprimer le journal suite à la publication d’une chronique d’Hadda Hazem qui critiquait la possibilité pour le président Abdelaziz Bouteflika de briguer un quatrième mandat.
Contacté par RSF, , l'Association Vigilance pour la Démocratie et l'Etat civique et le CTLP. l’ANEP n’a pas répondu aux questions à ce sujet.
La publicité publique est distribuée de manière discrétionnaire par l’ANEP aux médias algériens. Des journaux critiques du gouvernement algérien tels qu’El Watan ou El Khabar en sont privés plus depuis le milieu des années 90.
L’Algérie est 134ème au Classement mondial de la liberté de la presse de RSF.