Interpellation de la rédactrice en chef de Mada Masr, l’un des derniers médias indépendants en Egypte
Lina Attalah, la rédactrice en chef du quotidien Mada Masr, a été interpellée ce week-end et libérée sous caution. Cette arrestation est la dernière d’une longue série de pressions exercées par les autorités sur le média et son équipe. Reporters sans frontières (RSF) dénonce le harcèlement continu d’un symbole du journalisme indépendant en Egypte.
L’interpellation de ce dimanche est hautement symbolique. Non seulement parce que Lina Attalah est la rédactrice en chef de Mada Masr, l’un des derniers médias indépendants en Egypte, mais aussi parce qu’elle réalisait ce jour-là un reportage sur un célèbre journaliste détenu par les autorités : Alaa Abdel Fattah.
En milieu de journée, Lina Attalah se trouvait à l’extérieur de la prison de Tora, dans la banlieue sud du Caire, pour réaliser une interview de la soeur d’Alaa Abdel Fattah, qui est en grève de la faim depuis plus d’un mois pour protester contre l’interdiction des visites depuis l’apparition du coronavirus dans le pays. Les forces de sécurité lui ont ensuite confisqué son téléphone et l’ont conduite au commissariat. Après avoir été interrogée, elle a été libérée dans la soirée.
Ce n’est pas la première fois que Mada Masr et son équipe sont harcelés par les autorités. Le site Internet du média est bloqué depuis 2017 et inaccessible dans le pays, ce qui prive les journalistes de visibilité et rend sa survie économique d’autant plus difficile.
En novembre 2019, les forces de l’ordre ont perquisitionné les bureaux du média et interpellé quatre de ses journalistes, y compris Lina Attalah. L’opération de police avait eu lieu peu de temps après la publication d’une enquête sur le fils du président Abdel Fattah Al-Sissi.
“Le harcèlement contre Mada Masr n’a que trop duré, dénonce Sabrina Bennoui, responsable du bureau Moyen-Orient à Reporters sans frontières (RSF). Cette interpellation est un bien tragique résumé de la situation du journalisme en Egypte : une éminente journaliste, qui travaille pour un média indépendant censuré, est arrêtée pour avoir voulu informer sur le sort d’un autre éminent journaliste arbitrairement détenu.”
Cette arrestation est par ailleurs la cinquième arrestation de journalistes en moins de dix jours, après Moataz Wednan, Mostafa Al-Aasar, Haitham Hasan Mahgoub et Sameh Hanin. Lina Attalah est la seule à avoir été libérée.
L’Egypte occupe la 166e place au Classement mondiale de la liberté de la presse établi par RSF.