Expulsion d'un directeur de publication : "Une provocation à l'encontre du Forum des Iles du Pacifique", selon Reporters sans frontières

Reporters sans frontières appelle les pays du Forum des Iles du Pacifique à réagir fermement après l'expulsion, le 27 janvier 2009, du directeur de publication australien du quotidien Fiji Times. Rex Gardner est le troisième responsable étranger d'un média fidjien expulsé par le gouvernement issu du coup d'Etat militaire de 2006.

Reporters sans frontières appelle les pays du Forum des Iles du Pacifique à réagir fermement après l'expulsion, le 27 janvier 2009, du directeur de publication australien du quotidien Fiji Times. Rex Gardner est le troisième responsable étranger d'un média fidjien expulsé par le gouvernement issu du coup d'Etat militaire de 2006. Avant d'être expulsé, Rex Gardner et le journal avaient été condamnés par la Haute Cour à verser une amende de 100 000 dollars fidjiens (environ 40 000 euros) pour "outrage à magistrat". Reporters sans frontières dénonce l'expulsion de Rex Gardner et les pressions à répétition contre le Fiji Times. "Alors que les pays du Forum des Iles du Pacifique étaient réunis pour tenter de faire avancer la cause de la démocratie aux Fidji, le gouvernement issu du coup d'Etat prend une nouvelle décision contre la presse privée qui ressemble à une provocation. Nous espérons que les dirigeants du Forum vont accentuer leurs interventions pour que la liberté de la presse redevienne une réalité aux Fidji", a affirmé l'organisation. "Nous demandons que Rex Gardner, mais aussi Evan Hannah et Russell Hunter, expulsés auparavant, soient autorisés à revenir travailler aux Fidji. Ces expulsions constituent des abus de pouvoir", a ajouté Reporters sans frontières. Le 22 janvier, la Haute Cour a donné gain de cause au procureur général et au ministre de la Justice, Aiyaz Sayed-Khaiyum, lequel avait porté plainte après la publication d'une lettre dans le courrier des lecteurs du Fiji Times. Celle-ci critiquait une décision de justice qui avait légitimé le gouvernement provisoire issu du coup d'Etat. La Cour a condamné à des peines de prison avec sursis Rex Gardner, et le rédacteur en chef Netani Rika. Le quotidien avait plaidé coupable. Suite à cette décision, Rex Gardner, citoyen australien, a été expulsé le 27 janvier, en direction de Sydney. Il a été condamné à une peine avec sursis, à condition qu'il ne commette pas de nouvelle infraction dans les douze mois à venir. Or, le 26 janvier, un agent des services de l'immigration lui a annoncé son expulsion imminente, l'accusant d'être un "immigrant illégal". "Il fallait bien s'attendre à ce que l'Etat ne reste pas les bras croisés. Si nous étions dans un autre pays, cela se serait passé de la même manière", a déclaré au site Fijilive, le ministre de l'Immigration et de la Défense, Ratu Epeli Ganilau. "Aucune raison n'a été donnée quant à mon expulsion et je n'en aurai probablement aucune car c'est ainsi qu'ils opèrent", a déclaré Rex Gardner une fois arrivé en Australie. C'est la troisième expulsion en moins d'un an. En mai 2008, le précédent directeur du Fiji Times, Evan Hannah, lui aussi australien, avait été expulsé dans des conditions similaires. En février 2008, un autre ressortissant australien, Russel Hunter, directeur du Fiji Sun, avait également été contraint de quitter le pays. Par ailleurs, un autre quotidien fidjien, le Daily Post, est assigné en justice dans le cadre d'une plainte similaire d'outrage au magistrat. La date de la première comparution est fixée au 3 avril 2009. Reporters sans frontières appelle les juges à la plus grande prudence dans cette affaire. Par ailleurs, le gouvernement provisoire a promulgué une nouvelle loi, le 31 décembre 2008, permettant d'inculper les fonctionnaires coupables de livrer des informations à des personnes extérieures. Visiblement destinée à éviter les fuites dans la presse, les autorités ont choisi de créer une nouvelle infraction, "Misconduct in Public Office", incorporée aux textes relatifs à la Commission contre la corruption. Le contre-amiral Frank Bainimarama dirige depuis janvier 2007 un gouvernement provisoire issu de son putsch du 5 décembre 2006. Il a récemment repoussé la date d'un scrutin démocratique, alors qu'il avait promis d"organiser des élections en mars 2009". Le 26 janvier, lors d'un défilé militaire à Suva, il a déclaré que des modifications légales étaient nécessaires avant tout scrutin et que cela n'"avait pas d'importance si c'était dans 5 ou 10 ans". Le contre-amiral n'était pas présent à la réunion du Forum des Iles du Pacifique qui s'est tenue le 27 janvier, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, avec comme ordre du jour l'examen de la situation à Fidji, en particulier au regard des retards dans le processus de rétablissement de la démocratie.
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Updated on 20.01.2016