Etat d’urgence aux Maldives : RSF condamne les violences et pressions des autorités contre les journalistes

Alors que l’état d’urgence vient d’être proclamé, hier soir, aux Maldives, le gouvernement tente d’empêcher les médias de faire leur travail en relatant les informations liées à l’opposition. Reporters sans frontières (RSF) demande aux autorités du pays de cesser toute pression juridique et menace à l’encontre des journalistes.

Plusieurs violations de la liberté de la presse ont été commises aux Maldives depuis l’annonce, jeudi 1er février, de la libération d’opposants politiques par la Cour suprême du pays. Certains reporters, dont ceux de Raajje TV, affirment avoir été victimes de violences physiques exercées par la police, notamment lorsqu’ils couvraient les manifestations de joie de l’opposition. Sans faire de distinction, les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogène sur les journalistes. Muaviyath Anwar, du Sun Online, rapporte même avoir reçu un coup de matraque de la part d’un policier alors qu’il lui montrait sa carte de presse.


“Le gouvernement actuel doit cesser ces atteintes graves à la liberté d’informer, déclare Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières. Dans le contexte actuel de tension politique, il est indispensable que les journalistes puissent exercer leur travail en toute liberté. La proclamation de l’état d’urgence ne doit pas légitimer les atteintes à la liberté de la presse. Au lieu de stigmatiser les médias indépendants, les autorités de Malé doivent comprendre que laisser les journalistes publier des informations d’intérêt général est le meilleur moyen d’éviter l’escalade.”


A l’annonce de la décision surprise de la Cour suprême, Ismail Sofwan, responsable de la Commission de diffusion des Maldives, le gendarme de l’audiovisuel local, a menacé les chaînes de télévision privées de fermeture si leurs reportages “mettaient en danger la sécurité nationale”. Abdul Raheem Abdullah, chef adjoint du parti au pouvoir, a quant à lui demander aux forces de l’ordre de fermer immédiatement Raajje TV, une chaîne réputée proche de l’opposition, également cible de menaces d’attaques depuis plusieurs jours.


Le gouvernement du président Abdulla Yameen est sous pression depuis l’arrêt de la Cour suprême, qui a cassé les condamnations des prisonniers politiques et qui demande également la réintégration au Parlement d’une douzaine de députés d’opposition démis de leurs mandats. Alors que le Parlement a été fermé et les chefs de la police successivement limogés pour les empêcher de mettre en oeuvre la décision de la Cour suprême, le gouvernement tente de contrôler la couverture médiatique des récents évènements.


Dans une tentative de museler les prisonniers politiques, l’administration pénitentiaire avait déjà annoncé le 29 janvier dans un communiqué qu’elle intenterait des actions en justice contre les journalistes et les médias qui relaieraient les déclarations de détenus.


RSF s’alarme de la détérioration de la liberté d’information et de l’augmentation des violences contre les journalistes aux Maldives. En avril 2017, le blogueur Yameen Rasheed a été retrouvé poignardé à mort à son domicile, probablement pour ses enquêtes sur la corruption au sein du gouvernement : une victime de la censure pour laquelle aucune enquête crédible n’a encore été menée.


Les Maldives se situent à la 117ème place sur 180 pays dans le Classement mondial pour la liberté de la presse 2017.
Publié le
Updated on 23.08.2019