En mission à Malte, RSF exhorte le Premier ministre à ouvrir immédiatement une enquête publique sur le meurtre de Daphne Caruana Galizia

A la veille du premier anniversaire de l’assassinat de la journaliste maltaise Daphne Caruana Galizia, Reporters sans frontières (RSF) et quatre autres organisations de défense de la liberté de la presse et de la liberté d'expression ont rencontré le Premier ministre maltais Joseph Muscat à La Valette. Elles lui ont exprimé leurs inquiétudes sur le manque d'avancée significative dans l’enquête sur l’assassinat de la journaliste.

Qui a assassiné Daphne Caruana Galizia le 16 octobre 2017 en plaçant une bombe sous sa voiture ? Un an après les faits, l’enquête n’a toujours pas permis de répondre à cette question. Alors que trois suspects - dont le procès n’a toujours pas commencé - ont été arrêtés et incarcérés en décembre 2017, le nom des potentiels commanditaires reste en revanche une énigme.

 

Ce 15 octobre 2018, cinq organisations, parmi lesquelles RSF, sont à Malte pour une mission conjointe afin d’examiner les avancées des investigations. Elles se sont entretenues avec le Premier ministre Joseph Muscat, à qui elles ont demandé de tout mettre en oeuvre pour que les commanditaires du meurtre soient identifiés et jugés. La délégation a remis au Premier ministre une déclaration commune aux cinq organisations. Les ONG qui ont dénoncé l’impunité qui entoure l’assassinat de la journaliste d’investigation, ont également demandé au chef du gouvernement de prendre des engagements fermes pour garantir la liberté de la presse et la sécurité des journalistes dans le pays et d’ouvrir sans attendre une enquête publique sur ce meurtre*.

 

Lors de cet entretien, le Premier ministre - qui rencontrait ces représentants pour la première fois depuis l’assassinat, a assuré que l’ouverture d’une enquête publique était désormais assurée et n’était plus qu’une question de temps. Le chef du gouvernement a précisé que cette enquête publique indépendante visant à établir si le meurtre de la journaliste aurait pu être évité, pourrait débuter une fois l’enquête criminelle terminée.

 

“La rencontre avec le Premier ministre Joseph Muscat marque une étape mais force est de constater son manque d'empressement à ouvrir une enquête publique sur le meurtre, déclare Rebecca Vincent, directrice du bureau de RSF à Londres, présente au rendez-vous.Tant que cette enquête n’aura pas vu  le jour, les journalistes d'investigation maltais continueront d'être en danger sur l'île.”

 

Au cours de cette mission, les représentants de ces organisations ont également assisté à cinq audiences publiques dans des affaires de diffamation  (30 procès pour diffamation sont toujours en cours) visant la journaliste, et ce malgré sa disparition. Au moment de sa mort, Daphne Caruana Galizia était visée par 42 procès pour diffamation au civil et cinq au pénal et était également régulièrement la cible de menaces et de harcèlement. Malgré ces pressions, elle avait toujours refusé de se taire.

 

La journaliste d’investigation maltaise traquait la corruption jusque dans les plus hautes sphères du pouvoir. Elle avait notamment publié de nombreux articles sur l’implication de proches du Premier ministre Joseph Muscat, dans les Panama Papers, provoquant la tenue d’élections générales anticipées en 2017.

 

Les représentants seront à Malte jusqu’au 17 octobre et rencontreront d’autres membres du gouvernement et représentants de la société civile.

 

Comme à Paris, Londres, Bruxelles ou Berlin, RSF et ses partenaires honoreront la mémoire de Daphne Caruana Galizia au cours de différents hommages dont une veillée organisée à La Vallette le mardi 16 octobre au soir. La mission publiera un rapport conjoint sur les conclusions, qui sera présenté lors d’une conférence de presse le 17 octobre.

 

Malte occupe la 65ème place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse de RSF 2018, accusant un recul de 18 places par rapport à l’année précédente.

 

*En vertu de la loi maltaise, cette enquête publique serait totalement indépendante de la police et du gouvernement et serait menée par un panel de juges internationaux sans lien avec des hommes politiques ou le pouvoir en place.

Publié le
Updated on 16.10.2018