Détention arbitraire de Raymond Malonga au Congo : “le droit doit prévaloir sur la loi du plus fort.” (RSF)

Alors que la campagne électorale vient de s’ouvrir en République du Congo, un directeur de publication, malade, est incarcéré depuis plus d’un mois en mépris total du régime applicable en vigueur pour la presse. Reporters sans frontières (RSF) appelle les autorités à appliquer le droit à une procédure équitable en libérant ce journaliste qui n’a rien à faire en prison.

Les proches de Raymond Malonga sont inquiets. Le directeur de publication de Sel-Piment, un journal satirique très critique du pouvoir congolais, est détenu depuis le 2 février. “Mon père est malade, il était à la clinique depuis plusieurs jours et sous perfusion lorsqu’il a été arrêté et sa santé ne s’est pas améliorée avec la prison” témoigne son fils joint par RSF. La famille du journaliste déplore que les tentatives de médiation entamées avec celle de la plaignante n'aient pas abouti. RSF avait de son côté déjà dénoncé une détention illégale.


Le journaliste est poursuivi pour diffamation pour avoir reproduit un article relatant des accusations de détournements de fonds présumés de la part de Georgette Okemba, la femme de Jean-Dominique Okemba, dit “JDO”. Ce dernier est le neveu du président Denis Sassou Nguesso, qui cumule 36 années au pouvoir et qui est en lice pour un nouveau mandat à l’occasion de l’élection présidentielle prévue le 21 mars. Proche du chef de l’Etat, il dirige le Conseil national de sécurité du Congo, qui coiffe l’ensemble de services civils et militaires du pays. Accusé d’avoir commis un simple délit de presse, le journaliste avait été arrêté sur son lit d'hôpital par les services de renseignements…


“Il est indigne qu’un journaliste poursuivi pour de simples faits présumés de diffamation soit arraché de son lit d'hôpital, arrêté, et incarcéré depuis plus d’un mois au mépris du droit et de sa santé, déclare le responsable du bureau Afrique de RSF, Arnaud Froger. En pleine campagne électorale, la détention arbitraire et prolongée de ce journaliste malade envoie un signal politique désastreux. Le droit et les institutions devraient prévaloir sur la loi du plus fort.”


Joint par RSF, l'avocat du journaliste dit espérer qu’une audience se tienne la semaine prochaine afin que le journaliste puisse être enfin libéré. La loi sur la liberté de l’information et de communication en vigueur au Congo ne prévoit pas de peine de prison pour le délit de diffamation, sauf en cas de récidive, une fois qu’une première condamnation définitive a déjà été prononcée, ce qui n’est pas le cas pour Raymond Malonga.


Le Conseil supérieur de la liberté de communication (CSLC) qui avait pris une mesure conservatoire contre le journal a indiqué avoir levé cette sanction a fait savoir son président joint par RSF.


Les détentions de journalistes sont relativement rares au Congo mais elles peuvent parfois être prolongées lorsque les journalistes sont pris pour cibles par les autorités ou des personnes influentes et proches du pouvoir. Les circonstances de l’arrestation de Raymond Malonga rappellent tristement celles du directeur de l’hebdomadaire indépendant Talassa Ghys Fortuné Bemba lui aussi arrêté par les services de renseignement le 11 janvier 2017, peu de temps après avoir relayé la tribune d’un ancien chef rebelle. Le journaliste avait été libéré après 18 mois de détention au terme d’une intense campagne de mobilisation, notamment menée par  RSF.  A sa sortie de prison, il avait dû quitter son pays pour des raisons de sécurité. Dans son livre De l’enfer à la liberté publié en 2019, il témoignait des conditions déplorables dans lesquelles il avait été détenu : placement à l’isolement complet sans possibilité de parler avec les gardiens, absence de toilettes, d’eau et d’électricité dans sa cellule, privation de nourriture…


Le Congo occupe la 118e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.

Publié le
Mise à jour le 05.03.2021