Assassinat de Rubén Pat : “les autorités mexicaines n’ont pas su protéger le journaliste”
Alors qu’il avait fait une demande de protection, partiellement accordée, à la suite de menaces, le journaliste mexicain Rubén Pat a été assassiné ce 24 juillet dans l’Etat du Quintana Roo. Quelques jours plus tôt, le 9 juillet, Luis Pérez García était lui aussi assassiné dans le district de Mexico. Reporters sans frontières (RSF) appelle Andrés Manuel López Obrador, le nouveau président mexicain, à renforcer urgemment la protection des journalistes dans le pays.
Ce mardi 24 juillet au matin, le journaliste Rubén Pat, directeur de l’hebdomadaire digital Semanario Playa News, a été abattu de six coups de feux dans un café de Playa del Carmen, ville de l’Etat du Quintana Roo (sud-ouest du pays). Cet assassinat survient moins d’un mois après l'exécution de José Guadalupe Chan Dzib, journaliste du même média et chroniqueur pour la rubrique policière.
En mai dernier, Rubén Pat avait reçu des menaces via WhatsApp et sollicité un dispositif de sécurité urgent au mécanisme fédéral de protection des journalistes. Celui-ci ne lui avait alors accordé qu’un ‘bouton de panique’ et un GPS.
Après l’assassinat de José Guadalupe Chan Dzib, RSF était entrée en contact avec Rubén Pat. Celui-ci avait alors dénoncé l’insuffisance des mesures de protection qui lui avaient été accordées, alors que les menaces à son encontre persistaient. Il avait affirmé travailler dans la peur. RSF avait alors contacté le Mécanisme fédéral pour demander en urgence un renforcement de ces mesures de protection. Une demande restée sans réponse.
En juin 2017, Rubén Pat avait été arrêté arbitrairement, menacé et torturé par des membres de la police locale de la municipalité de Solidaridad, quelques jours après avoir dévoilé des informations sur des liens entre des fonctionnaires et des bandes criminelles locaux.
"Les autorités mexicaines doivent tirer les conséquences de ce terrible événement : le mécanisme fédéral de protection a failli dans sa mission à protéger Rubén Pat, dont la situation de vulnérabilité était connue depuis longtemps", déclare Emmanuel Colombié, directeur du bureau Amérique latine de RSF. "RSF apporte tout son soutien à la rédaction de Semanario Playa News et demande aux autorités d’identifier dans les plus brefs délais les auteurs matériels et intellectuels de cette exécution”
Deux assassinats de journalistes moins de 15 jours
La veille, le bureau du procureur de la justice de l’Etat de Mexico avait annoncé la mort d’un autre journaliste, Luis Pérez García (75 ans), retrouvé sans vie à son domicile le 9 juillet 2018 dans la capitale Mexico. Selon les premiers éléments de l’enquête, des individus se sont introduits à son domicile et l’ont frappé violemment derrière la tête, avant d’incendier son immeuble et de prendre la fuite. Les pompiers, alertés par les voisins, ont découvert son corps et d’abord pensé à une mort par asphyxie, avant de réaliser qu’il s’agissait bien d’une exécution que l’incendie était destiné à masquer. RSF demande à ce que la piste professionnelle ne soit en aucun cas occultée par les enquêteurs, qui doivent au plus vite identifier et traduire en justice les responsables de cet acte d’une incroyable lâcheté.
Luis Pérez García était directeur du magazine Encuesta de Hoy depuis plus de 30 ans, et membre de l’association nationale des animateurs radio du Mexique (Asociación Nacional de Locutores de México- ANLM).
Rubén Pat et Luis Pérez García sont les 7e et 8e journalistes assassinés en 2018, après Héctor González Antonio, Juan Carlos Huerta, Leobardo Vázquez Atzin, Carlos Domínguez Rodríguez, José Guadalupe Chan Dzib et Pamela Montenegro.
Le mois dernier, RSF appelait le nouveau président du Mexique à prendre dès le début de son mandat ses responsabilités pour endiguer cette spirale de violence. Ces nouveaux assassinats justifient encore un peu plus de l’urgence de renforcer la protection des journalistes mexicains.
Le Mexique se situe à la 147e place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2018.