La répression iranienne se surpasse à l'approche des élections : une rédaction entière séquestrée et deux journalistes toujours victimes de disparition forcée

Les forces de sécurité iraniennes ont séquestré la rédaction de Farda-e-Eghtesad pendant quatre jours, avant d'arrêter quatre journalistes dans un lieu inconnu le 9 février. Si la libération de Behzad Bahmannejad et Merghad Asgari a été annoncée publiquement le 21 février, Nikan Khabazi et Ali Tasnimi sont toujours détenus. Reporters sans frontières (RSF) tire la sonnette d'alarme face à l'escalade de la répression contre les journalistes, à l'approche des élections législatives en Iran. Les journalistes doivent être libérés immédiatement.


Mise à jour 11/04/24 : Nikan Khabazi a été libéré sous caution le 18 mars 2024. Ali Tasnimi a lui été libéré sous caution le 10 avril 2024, plus de deux mois après la séquestration de sa rédaction et son arrestation.


Le 21 février, la nouvelle de la libération sous caution à Téhéran, une semaine plus tôt, de deux journalistes du journal économique Farda-e-Eghtesad : le vidéo-journaliste Mehrdad Asgari, et le rédacteur en chef adjoint Behzad Bahmannejad, a été rendue publique. Les autorités iraniennes avaient libéré les deux reporters le 16 février, mais leur avaient demandé de ne pas commenter leur détention, selon les sources de RSF. Cependant, on est toujours sans nouvelles de leurs deux collègues, Nikan Khabazi et Ali Tasnimi, arrêtés avec eux le 9 février et emmenés dans un lieu inconnu. Les autorités iraniennes n'ont toujours pas fait de déclaration officielle sur leur sort.

Cette terrible histoire a commencé le lundi 5 février, lorsqu'une douzaine de policiers ont fait irruption dans la rédaction des quatre journalistes, les détenant avec 26 de leurs collègues présents dans le bâtiment. Personne n'a été autorisé à quitter le bâtiment avant le lendemain, et une partie du personnel est restée séquestrée pendant quatre jours, jusqu'au 9 février, date à laquelle les quatre journalistes ont été emmenés. Lors de cette séquestration de la rédaction, la police n'a donné aucune motif de détention. Le personnel du média se sont vu confisquer leurs téléphones et ont été empêchés de communiquer avec leurs familles et leurs avocats.

"Malgré la bonne nouvelle de la libération de Behzad Bahmannejad et Merghad Asgari, la détention secrète de leurs collègues Nikan Khabaz et Ali Tasnimi dans des circonstances inconnues à la suite de la séquestration de la rédaction de Farda-e-Eghtesad équivaut à une disparition forcée. Ces tactiques d'intimidation et de terreur, qui s’inscrivent dans une volonté des autorités de réduire au silence les journalistes iraniens, doivent cesser. Nous demandons la libération immédiate des deux journalistes de Farda-e-Eghtesad ainsi que des 15 autres journalistes actuellement détenus en Iran.

Jonathan Dagher
Responsable du bureau Moyen-Orient de RSF

Le lendemain de la descente des forces de sécurité dans la rédaction, l'agence de presse Mizan, contrôlée par la justice iranienne, avait annoncé que "l'inspection des locaux des médias par les officiers judiciaires et les arrestations n'avaient rien à voir avec ses activités journalistiques et médiatiques", sans en préciser le motif. Selon les informations de RSF, la séquestration et la détention du personnel font suite à la publication d'un reportage vidéo – depuis supprimé – sur la question du contournement des sanctions. Les détails concernant la publication, le contenu et la suppression de la vidéo restent flous. Sous couvert d'anonymat, l'un des journalistes séquestrés a déclaré à RSF que la police avait posé des questions aux membres de la rédaction sur Majid Zamani, fondateur et ancien membre d'une institution financière propriétaire du journal. 

Les autorités iraniennes arrêtent régulièrement des journalistes qui révèlent au monde des informations sensibles, mais d'intérêt public. Les 22 et 29 septembre 2022, les journalistes Niloofar Hamedi et Elaheh Mohammadi ont été respectivement détenus pendant plus d'un an, pour avoir été parmi les premiers reporters à couvrir la mort, le 16 septembre 2022, de Mahsa Amini pendant sa garde à vue. Depuis, 87 autres reporters ont été détenus pour avoir couvert le mouvement de protestation qui a suivi la mort de la jeune Kurde. Quinze d'entre eux sont toujours en prison à ce jour.

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Publié le
Updated on 11.04.2024