RSF dénonce la condamnation à vingt ans de prison du blogueur vietnamien Le Dinh Luong

Un an après son arrestation, le blogueur Le Dinh Luong s’est vu infligé une peine record de vingt ans de réclusion criminelle pour avoir tenté d’informer ses concitoyens sur Internet. Reporters sans frontières (RSF) condamne ce verdict inique et appelle les députés européens à réagir pour ne pas cautionner une flagrante violation de la liberté d’informer.

C’est la plus longue peine jamais prononcée au Vietnam contre un citoyen qui tentait d’informer le public. A l’issue d’un procès expéditif, sans que les témoins de la défense n’est pu être cités à comparaître, le blogueur Le Dinh Luong a été condamné ce matin, jeudi 16 août, à une peine de vingt ans de prison pour "tentative de renversement de l'Etat”. L’un de ses “crimes” est d’avoir dénoncé sur Facebook la société taiwanaise Formosa, responsable d’une importante pollution marine dans la province centrale de Ha Tinh, ainsi que l’incurie des autorités vietnamiennes face à ce désastre environnemental.


“L’extrême lourdeur de la peine infligée à Le Dinh Luong est un nouveau signe de l’inquiétante intensification de la spirale de répression à laquelle se livre l’actuelle direction du Parti communiste vietnamien, remarque Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF. 


"Cet étouffement de toute voix indépendante est contraire aux standards internationaux. Alors que l’Union européenne doit ratifier un traité de libre-échange avec le Vietnam en 2018, nous appelons les députés européens à geler tout projet d’accord commercial afin de ne pas cautionner de pareilles violations de la liberté d’informer.”


Ecrivant sur Facebook sous le pseudonyme Lo Ngoc, Le Dinh Luong a documenté de nombreux sujets de société. L’acte d’accusation, dont RSF a pu se procurer une copie, repose presque intégralement sur l’analyse des données Facebook du blogueur - et non sur le seul contenu des articles qu’il a publiés, comme c’était jusque-là le cas pour d’autres blogueurs condamnés au Vietnam.


Pour cette raison, cette décision est perçue comme une préfiguration de ce que sera l’Internet vietnamien après l’entrée en vigueur de la loi sur la cybercriminalité adoptée il y a deux mois. Le texte oblige notamment les plates-formes à censurer tout contenu jugé litigieux par le gouvernement, à stocker les données des utilisateurs sur le sol vietnamien et à les livrer à la demande des autorités. Censé entrer en vigueur au 1er janvier 2019, il porterait un coup fatal à la vivacité du journalisme citoyen au Vietnam.


Avec des médias traditionnels alignés sur la ligne du Parti, le pays stagne dans les abîmes du Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2018, à la 175e place sur 180 pays.

Publié le
Updated on 16.08.2018