Le blogueur maldivien Yameen Rasheed poignardé à mort

Reporters sans frontières (RSF) est profondément choquée par le meurtre du blogueur maldivien Yameen Rasheed, poignardé dimanche dans son immeuble à Malé. L’organisation condamne fermement cet acte barbare qui prive le pays d’un penseur libre et détériore davantage la liberté d’information déjà mise à mal par ses ennemis.

Dans la nuit de samedi à dimanche, le critique influent Yameen Rasheed, 29 ans, a été poignardé à mort à son domicile. Son site d’information, The Daily Panic, est connu pour ses articles qui traitent de la justice sociale et pointent l’incompétence et la corruption des autorités locales. Sur son compte Twitter, Yameen Rasheed se définissait comme un “journaliste indocile” et revendiquait son travail comme un moyen de traiter “la vérité sans filtre, les faits écoeurants, les détails terribles, et - parce que nous sommes aux Maldives - l’évidence douloureuse”.


Selon Zaheena Rasheed, rédactrice en chef du site d’information Maldives Independent et proche de Yameen Rasheed, le blogueur avait reçu plusieurs menaces de mort qu’il avait maintes fois signalées à la police. La journaliste a déclaré aux médias que ce drame vient entretenir un fort ressentiment envers la police, qui avait connaissance des menaces mais n’avait pas engagé les moyens nécessaires pour assurer la sécurité du journaliste citoyen. Critique des mouvements islamistes opérant dans le pays, mais aussi du pouvoir en place, en 2015, Yameen Rasheed avait été arrêté et emprisonné pendant trois semaines pour avoir participé à une manifestation contre le gouvernement.


"Nous sommes choqués par le meurtre de Yameen Rasheed, qui incarnait à lui seul l’information libre, la pensée humaniste et les valeurs démocratiques aux Maldives, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières. Nous demandons au gouvernement du président Abdulla Yameen de faire toute la lumière sur ce crime odieux et de tout mettre en oeuvre afin qu’il ne reste pas impuni. Toute économie de moyens ne saurait être perçue autrement que comme une approbation tacite par le pouvoir du le crime d’un de ses plus fervents critiques."


Le meurtre de Yameen Rasheed n’est pas sans lien avec certaines atteintes à la liberté d’expression aux Maldives et violences à l’encontre des professionnels de l’information, des journalistes citoyens et des blogueurs. Le blogueur avait notamment fait de la disparition du journaliste de Minivan News Ahmed Rilwan en août 2014, un combat personnel. Sur son site, Yameen Rasheed demandait régulièrement des réponses aux questions soulevées par les proches du journaliste. Malgré ses efforts et ceux de la famille d’Ahmed Rilwan pour obtenir des informations de la police, cette dernière refuse toujours d’informer de l’avancée de son enquête et la disparition du journaliste demeure à ce jour non élucidée.


Le meurtre de Yameen Rasheed rappelle également l'agression quasi fatale, en 2012, du journaliste et défenseur des droits de l’homme Ismail Hilath Rasheed. Le journaliste avait été sérieusement blessé à l’arme blanche après avoir été menacé de mort à plusieurs reprises.


L’archipel des Maldives est classé 112ème sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse 2016.

Publié le
Mise à jour le 23.08.2019