Expulsion de journalistes du Liban : RSF et la Fondation Samir Kassir rappellent les autorités à leurs obligations en matière de liberté de la presse

Après l’expulsion du Liban, sans aucun motif, d’un journaliste de Reuters, RSF et la Fondation Samir Kassir appellent les autorités à revenir sur leur décision et alertent sur l’inquiétant précédent que cette mesure peut constituer pour l’avenir de la profession dans le pays.

Depuis un mois et demi, le grand reporter en Jordanie et en Syrie Suleiman Al-Khalidi et son employeur l’agence de presse Reuters attendent toujours de savoir pour quelle raison il a été refoulé du Liban le 2 août dernier.


Ce jour là, alors qu’il est appelé à venir renforcer les effectifs de l’agence à Beyrouth en amont du premier anniversaire de l’explosion survenue dans la capitale, le journaliste - de nationalité jordanienne - est bloqué à son arrivée à l’aéroport Rafic Hariri puis conduit au bureau de la Sûreté générale pour y être interrogé. Les agents lui intiment de livrer ses appareils électroniques pour les fouiller, ce qu’il refuse. Il est ensuite maintenu en rétention pendant plusieurs heures avant d’apprendre qu’il va être renvoyé du pays. Après plusieurs semaines de sollicitations, Reuters reçoit un courrier du ministère libanais de l’Intérieur et obtient pour seules explications que la mesure résulte d’une “décision souveraine”.


Suleiman Al-Khalidi s’est déjà rendu au Liban à plusieurs reprises. Ce journaliste a fait preuve de professionnalisme tout au long de ses 27 ans de carrière au sein de Reuters pour laquelle il a couvert des zones de guerre et a même été arrêté puis expulsé de Syrie au début du conflit en 2011, avant de gagner le Prix Samir Kassir pour la liberté de la presse en 2012. Une telle décision unilatérale, associée à la tentative de fouiller les effets personnels du reporter, peut constituer un inquiétant précédent pour d’autres journalistes à l’avenir.


Le refoulement de Suleiman Al-Khalidi constitue une nouvelle entrave à la libre circulation de l’information au Liban, affirme le directeur exécutif de la Fondation Samir Kassir Ayman Mhanna. La Fondation Samir Kassir lance un avertissement contre de telles décisions, à un moment où les Libanais-es comptent plus que jamais sur les journalistes pour décrire leur souffrance et enquêter sur les raisons de l’effondrement économique.”


Nous appelons les autorités libanaises à laisser Suleiman Al-Khalidi exercer librement son métier sur le territoire, déclare la responsable du bureau Moyen-Orient de RSF Sabrina Bennoui. Si elles ne sont pas en mesure de fournir un motif clair et valable, la décision est par nature purement arbitraire et doit être levée.


Ce n’est pas la première fois qu’un journaliste se voit refuser l’entrée au Liban. Selon la Fondation Samir Kassir, le journaliste américano-égyptien Ayman Mohyeldin (présentateur sur NBC) et l’Américano-koweïtien Ahmed Shihab-Eldin (documentariste pour Vice News) ont tous les deux été refoulés, respectivement en 2018 et en 2016. Mais cette fois, la raison était précisée : leur passeport comportait un visa israélien en raison de précédents reportages en Israël et dans les territoires palestiniens. 


En 2021, le Liban occupe la 107e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.

Publié le
Mise à jour le 13.09.2021