Deux ans de guerre en Ukraine : plus de 100 journalistes victimes d’exactions des forces armées russes

Tirs meurtriers, arrestations, disparitions… Journalistes et médias sont dans le viseur des forces armées russes depuis leur invasion de l’Ukraine lancée le 24 février 2022. Reporters sans frontières (RSF) dresse le bilan des exactions commises envers les journalistes ukrainiens et internationaux et salue leur travail courageux.

Depuis l’invasion russe du 24 février 2022, des milliers de journalistes ukrainiens et internationaux accrédités en Ukraine continuent de couvrir la guerre malgré un contexte sécuritaire dégradé dans l’ensemble du pays, en raison de tirs ciblés ou de bombardements indiscriminés provenant des forces armées russes. En deux ans, au moins une centaine de journalistes ont été victimes d’exactions, selon les informations de RSF. Parmi eux, 11 reporters ont perdu la vie dans le cadre de leur activité. D’autres ont été victimes de bombardements sur leurs rédactions notamment, certains ont été blessés ou ont disparu. Dans les territoires ukrainiens occupés par la Russie, les voix indépendantes locales ont été réduites à néant, contraintes de cesser toute activité.

“Les médias sont des victimes directes de l’invasion russe en Ukraine. Malheureusement, en 2023 comme en 2022, des journalistes en reportage ont payé leur travail de leur vie, d’autres ont été blessés, emprisonnés par les forces d’occupation russes, ont disparu. RSF rend hommage au courage de ces professionnels qui continuent de couvrir la guerre et exige que les auteurs des crimes commis contre eux soient traduits en justice.

Jeanne Cavelier
Responsable du bureau Europe de l'Est et Asie centrale de RSF
  • 11 journalistes tués

Deux journalistes en reportage près de la ligne de front en Ukraine sont morts en 2023, venant s'ajouter aux neuf journalistes tués l'année précédente. Arman Soldin, journaliste franco-bosnien de l'Agence France-Presse (AFP), a été pris sous une pluie de roquettes le 9 mai, alors qu'il couvrait la situation près de Bakhmout, dans la région de Donetsk. Quelques jours plus tôt, Bohdan Bitik, journaliste et fixeur ukrainien, était abattu par un sniper russe lors d'un reportage avec le correspondant du quotidien italien La Repubblica près de Kherson, dans le sud-est du pays. 

  • Au moins 35 journalistes blessés

Depuis février 2022, 35 reporters ukrainiens et étrangers ont été blessés lors de reportages, notamment dans les régions proches du front. Ils ont été délibérément pris pour cible ou ont été victimes de tirs contre des tours de télévision, des locaux de rédactions – récemment à Kyiv et à Kharkiv –  ou des lieux habituellement fréquentés par les civils et les journalistes – comme les attaques de janvier contre deux hôtels à Kharkiv. 

  • Au moins 12 journalistes détenus  

Dans les territoires ukrainiens occupés, la Russie traque les journalistes refusant de collaborer. En deux ans, au moins 12 journalistes locaux ont été détenus par les forces d’occupation russes, et certains ont été condamnés. En Crimée, la répression contre les journalistes indépendants s’est intensifiée. La journaliste indépendante collaborant avec plusieurs médias de Crimée Iryna Danylovytch a été enlevée par les forces du renseignement intérieur russe (FSB) dans la péninsule en avril 2022 et transférée dans une prison en Russie en juillet 2023. À Melitopol, ville occupée du sud-est de l’Ukraine, plusieurs professionnels des médias coopérant avec la chaîne Telegram du site d’information ukrainien RIA-Melitopol ont été arrêtés en août 2023 pour “espionnage” et sont depuis en prison.

  • 2 journalistes actuellement disparus 

Deux journalistes ukrainiens sont toujours portés disparus en Russie. Victoria Roshchyna, freelance pour le média en ligne Ukraïnska Pravda, n'a pas donné signe de vie depuis le 4 août 2023, alors qu'elle se rendait dans les territoires occupés via la Russie. En mars 2022, lors d’un reportage pour le média ukrainien indépendant Hromadske, elle avait été enlevée par les forces russes dans la ville occupée de Melitopol, avant d’être finalement relâchée quelques jours plus tard. Selon une enquête de RSF, Dmytro Khyliuk, journaliste pour l’agence de presse ukrainienne en ligne Unian, est victime de “disparition forcée". RSF a pu démontrer qu’il était vivant, qu’il avait été arrêté par des forces russes et mis en détention en Russie.  

  • RSF a déposé 18 plaintes pour crimes de guerre

En deux ans, RSF a déposé huit plaintes pour crimes de guerre simultanément auprès de la Cour pénale internationale (CPI) et auprès du procureur général d’Ukraine, ainsi que deux plaintes auprès de la justice française. Dans le cadre de ces plaintes, RSF a documenté plus de 50 attaques dont ont été victimes plus de 100 journalistes, qui ont été tués, blessés, enlevés, pris en otage, torturés ou pris dans des bombardements.

  • 233 médias fermés

Occupation russe, effondrement du marché de la publicité, manque d’effectifs suite au départ ou à la mobilisation des collaborateurs des médias, matériels détruits par des bombardements... 233 médias ukrainiens ont dû fermer depuis le 24 février 2022, selon l’Institute of Mass Information (IMI), partenaire local de RSF, comme le média littéraire national en ligne Sho qui a mis la clef sous la porte pour des raisons économiques.  

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