Chine: RSF demande la libération des journalistes citoyens Lu Yuyu et Li Tingyu

Reporters sans frontières dénonce le ciblage de l’information citoyenne par Pékin et demande aux autorités chinoises de remettre en liberté les journalistes citoyens Lu Yuyu et Li Tingyu, arrêtés le 15 juin dernier alors qu’ils documentaient des manifestations ouvrières, et accusés de “chercher querelle et susciter des troubles”.


Le 6 juillet dernier, les deux journalistes ont pu voir des avocats au centre de détention de Dali (Yunnan, sud-ouest), où ils sont détenus depuis plus de trois semaines. Lu Yuyu et Li Tingyu avaient subitement cessé de donner des nouvelles le 15 juin 2016 alors qu’ils se trouvaient dans la ville de Dali, suscitant l’inquiétude de leurs collaborateurs et de leurs proches.


Ces arrestations, qui prennent la forme d’enlèvements, et les charges qui semblent peser actuellement sur les journalistes sont les signes caractéristiques de la répression de Pékin à l’encontre des journalistes qui produisent une information jugée néfaste par le Parti communiste chinois, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières. Plutôt que de réprimer tous ceux qui fournissent des informations d’intérêt général, les autorités devraient remercier les deux journalistes citoyens et utiliser leur travail afin d’améliorer la situation catastrophique des droits de l’homme dans le pays.


Depuis 2012, Lu Yuyu et Li Tingyu documentaient les mouvements sociaux et les manifestations ouvrières dans toute la Chine, en surveillant quotidiennement les réseaux sociaux, notamment les Weibo, QQ, et certains forums (BBS) à la recherche d’informations, de photos et de témoignages de citoyens en grève ou manifestant pour leurs droits. Ils publiaient ensuite les informations collectées sur les réseaux sociaux (Weibo, Twitter) et sur un site d’information, wickedonna.blogspot.com, qui n’a pas été mis à jour depuis le 15 juin dernier.



Menaces voilées sur l’information diffusée par les blogueurs


Cette double arrestation intervient dans un contexte de durcissement à l’égard des réseaux sociaux, dont Pékin redoute l’impact croissant, et des journalistes citoyens et blogueurs, de plus en plus nombreux dans le pays. Le 3 juillet 2016, l’Administration chinoise du Cyberespace a publié une notice à l’attention de tous les médias, leur interdisant de baser leurs contenus sur les réseaux sociaux sans une stricte vérification des faits. Si la demande ressemble à un simple rappel déontologique, elle vise en réalité à dissuader les médias d’utiliser l’information, souvent militante ou mettant en cause les autorités, produite par les journalistes citoyens et les blogueurs. En avril 2016, la journaliste citoyenne Wang Jing, qui travaillait pour le site d’information du célèbre dissident Huang Qi, 64Tianwang, a été condamnée à une peine de prison de près de 5 ans pour avoir couvert, en 2014, une auto immolation survenue sur la place Tian’anmen, «causant un trouble dans le cyberespace», selon la cour de Jilin (nord-est du pays). Par ailleurs, une nouvelle loi chinoise sur les ONG adoptée en avril par le Parlement donne aux autorités des pouvoirs étendus sur les organisations de la société civile, et pourrait leur permettre de justifier plus facilement encore des arrestations journalistes citoyens ou le démantèlement de leurs associations.


La Chine se situe à la 176e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2016 établi par Reporters sans frontières.

Publié le
Mise à jour le 07.07.2016