Visite de l'ambassadeur français pour les droits de l'homme : "la libération des journalistes serait un gage d'ouverture"

Reporters sans frontières saisit l'opportunité du déplacement de l'ambassadeur français pour les droits de l'homme, François Zimeray, au Turkménistan, du 26 au 28 mai 2010, pour réitérer son inquiétude et ses attentes, pour l'instant déçues, en matière de liberté de la presse. Les autorités turkmènes disposent d'une belle opportunité de se montrer à la hauteur des attentes qu'a fait naître le changement de pouvoir à la tête de l'Etat. Elles ont beaucoup à gagner en normalisant la situation du pays sur la scène internationale, normalisation qui doit passer par une libéralisation du régime. Et notamment par la fin des violations flagrantes des droits de l'homme. Ainsi le pays continue de se présenter comme une forteresse hermétique aux libertés fondamentales. Reporters sans frontières a été informée des difficultés rencontrées par des journalistes indépendants. Le 19 mai, l'un des correspondants de Radio Free Europe / Radio Liberty, Allamourad Rakhimov, a ainsi été empêché d'entrer sur le territoire turkmène, bien qu'il ait disposé d'un visa. Il a été embarqué sur un vol retour à destination de Prague sans avoir été informé des raisons de cette interdiction . Par ailleurs, les pressions se poursuivent sur les journalistes indépendants qui, forcés à la clandestinité, s'efforcent de fournir à leurs concitoyens une information indépendante sur la société. Ils sont convoqués par les autorités, soumis à des interrogatoires, menacés de poursuites, renvoyés de leur emploi, et leurs proches sont encore l'objet de représailles. Nous appelons une nouvelle fois les autorités turkmènes à entrouvrir la porte du dialogue. Les amnisties régulièrement prononcées par le président Berdymoukhamedov pourraient être étendues aux journalistes, défenseurs des droits de l'homme et prisonniers politiques. Ce geste distinguerait nettement la nouvelle classe politique de ses prédécesseurs. Et contribuerait à accroître la confiance dans le pays, notamment en termes de relations commerciales. Tout particulièrement, nous rappelons qu'Annakourban Amanklytchev et Sapardurdy Khadjiev, condamnés à 8 ans de prison pour avoir aidé une journaliste française à réaliser pour France 2, un reportage sur le Turkménistan, sont toujours détenus dans un établissement pénitentiaire. Ils ont déjà purgé une partie de leur peine. Leur remise en liberté conditionnelle, et dans cette attente, l'amélioration de leurs conditions de détention seraient des gages inestimables de dialogue et de bonne volonté. Quant à la mort d'Ogoulsapar Mouradova, en prison des suites de mauvais traitements, le 12 septembre 2006, une enquête doit être ouverte et ses conclusions rendues publiques. Le 7 avril 2010, la France a examiné la ratification de l'accord de partenariat entre l'UE et le Turkménistan. La commission des affaires étrangères, à l'initiative du rapporteur Gaëtan Gorce, a posé des conditions à cette ratification. Parmi celles-ci, la libération des deux journalistes emprisonnés. Reporters sans frontières s'en félicite, car les conditions envisagées constitueraient non pas une ingérence dans les affaires intérieures du pays, mais des gages concrets d'ouverture et de capacité au dialogue. Le Turkménistan est l'un des régimes les plus fermés et les plus répressifs au monde. Aucune presse libre n'y est autorisée. Tous les médias turkmènes sont contrôlés par l'Etat et le président est le directeur de chaque publication. Le pays émarge à la 173e place, sur 175, dans le classement de la liberté de la presse, publié en 2009 par Reporters sans frontières.
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Mise à jour le 20.01.2016