Une policière, accusée de torture contre une journaliste, acquittée en appel

Reporters sans frontières et Media Legal Defense Initiative condamnent fermement la décision de la cour d’appel de Manama, rendue le 23 juin 2013, d’acquitter la policière, Lt Sarah Al-Moosa, jugée pour “torture” et “mauvais traitements” à l’encontre de la correspondante au Bahreïn de France 24 et de Radio Monte Carlo Doualiya, Nazeeha Saeed. “La décision de la Cour d’appel d’acquitter la policière montre bien le manque d’indépendance de la justice bahreïnie, ainsi que la politique à double visage des autorités du Bahreïn, avant tout préoccupées par leur image auprès de la communauté internationale”, ont déclaré RSF et MLDI. “Nous demandons au procureur général de se saisir du dossier et de le porter devant la Cour de Cassation.” “Ce verdict encourage l'impunité au sein des services de sécurité au Bahreïn. J'ai trois certificats médicaux en ma possession, dont deux venant du Ministère de l'Intérieur, et pourtant personne n'est puni” a indiqué Nazeeha Saeed à RSF. Les faits remontent au 22 mai 2011. La journaliste est convoquée à la station de police de Rifaa, suite à sa couverture des manifestations pro-démocratiques contre le régime du Bahreïn. Nazeeha Saeed, accusée de “mensonges” dans ses reportages, est interrogée sur ses liens éventuels avec la chaîne du Hezbollah, Al-Manar, et la chaîne de la République islamique d’Iran en arabe Al-Alam. La journaliste est alors victime d’actes de torture et de mauvais traitement de la part des forces de l’ordre, dans l’enceinte de la station de police, actes dénoncés par Reporters sans frontières. Media Legal Defence Initiative avait envoyé une lettre d'allégation à l'intention des Rapporteurs Spéciaux des Nations-Unies en janvier 2013, leur demandant de mener une enquête avec les autorités bahreïnies sur le traitement du cas de Nazeeha Saeed. Le 22 octobre 2012, la policière avait été reconnue non-coupable par le tribunal de première instance de Manama, qui avait jugé les dépositions de la victime “contradictoires” et “non conformes au rapport du médecin légiste”. Suite à la forte mobilisation médiatique qu’avait suscité un tel verdict, le parquet, soucieux de souligner publiquement le respect des autorités bahreïnies vis-à-vis de leurs engagements internationaux, avait alors fait appel du jugement rendu. Désormais loin des caméras, la justice du Bahreïn réitère sa décision d’innocenter la policière, sur la base d’un argumentaire peu étayé. Ce déni de justice n’est malheureusement pas un cas isolé. Ces affaires révèlent la difficulté des professionnels de l’information d’exercer librement leur métier au Bahreïn, pays figurant au 165ème rang du classement mondial de la liberté de la presse 2013.
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Updated on 20.01.2016