Un journaliste violemment agressé décède après une tentative de suicide

Abdelhaï Beliardouh (voir photo), correspondant d'El Watan à Tébessa, est décédé dans la nuit du 19 au 20 novembre, à l'hôpital Mustapha, à Alger. Il avait, un mois plus tôt, tenté de se suicider suite à une agression dont il avait été victime et aux pressions dont il avait été l'objet de la part d'un notable de Tébessa au mois de juillet. Reporters sans frontières ne peut qu'être effarée de l'issue de cette affaire. Voilà où peut en arriver un journaliste qui a subi trop de pressions. Nous présentons toutes nos condoléances à la famille du journaliste ainsi qu'à ses confrères d'El Watan. Nous espérons que l'auteur de l'agression sur Abdelhaï Beliardouh sera rapidement jugé pour ses agissements inadmissibles. En juillet, l'organisation avait qualifié cet acte de " grave dérapage, symptomatique d'un Etat de non-droit ". Reporters sans frontières, dont un représentant s'est rendu en Algérie fin octobre, rendra public, le 25 novembre prochain, un rapport intitulé " Algérie : la liberté de la presse victime de l'Etat de non-droit ". Le 19 octobre, Abdelhaï Beliardouh, dans un état de grande tension, avait avalé, à Tébessa, de l'acide pur. Il avait été rapidement hospitalisé à l'hôpital Mustapha, à Alger. L'acide avait provoqué de graves lésions internes, notamment à l'œsophage et à l'estomac. Le 20 juillet 2002, Saâd Garboussi, président de la Chambre de commerce et d'industrie des Nememchas (wilayas de Tébessa et de Souk Ahras), s'était présenté, avec trois fonctionnaires de la Chambre de commerce, dont un armé, au domicile d'Abdelhaï Beliardouh, correspondant d'El Watan à Tébessa. Le journaliste avait été roué de coups devant sa famille avant d'être traîné, par le col de sa chemise, dans les rues de la ville et ce, jusqu'à la place publique du 1er Novembre. Il avait alors été de nouveau violenté et insulté publiquement. Selon le communiqué d'El Watan du 21 juillet, ni la police ni la gendarmerie n'étaient intervenues pour porter secours au journaliste. Il avait ensuite été conduit, en voiture, dans la cave de la villa de Saâd Garboussi où il a été interrogé sur la source d'une information, parue le jour même, dans le quotidien francophone. Cette agression faisait suite à la parution, dans l'édition du 20 juillet d'El Watan, d'un article intitulé "Arrestation du président de la Chambre". Abdelhaï Beliardouh écrivait notamment que Saâd Garboussi "aurait été cité par un repenti comme étant un pourvoyeur de fonds pour le terrorisme" et "aurait participé au blanchiment des fonds du GIA, fruits du crime et du racket qui ont endeuillé les régions de Médéa et de Jijel". Peu avant cette agression, Saâd Garboussi avait appelé Fayçal Métaoui, rédacteur en chef par intérim du quotidien, pour lui demander d'inclure, dans l'édition du lendemain, sa mise au point. Quand Fayçal Métaoui lui avait expliqué que cela ne serait pas possible avant l'édition du lundi, le président de la Chambre de commerce et d'industrie avait lancé : "Vous allez voir, je vais lui en faire voir de toutes les couleurs." Le 21 juillet, la rédaction d'El Watan avait déposé plainte auprès du procureur de la République de Tebessa pour "séquestration et intimidation". Par ailleurs, elle avait saisi les autorités locales sur la nécessité de veiller à la sécurité de Abdelhaï Beliardouh, sommé par ses agresseurs de ne pas récidiver au risque de perdre sa vie, et celle de ses proches. Le 22 juillet, dans une interview accordée au quotidien Le Matin, Abdelhaï Beliardouh avait déclaré que l'agression qu'il avait subie était "du banditisme, pis, du terrorisme". De son côté, le président de la Chambre de commerce avait, dans un communiqué adressé à la rédaction d'El Watan, démenti l'agression. Il avait ajouté avoir déposé une "plainte contre les parties".
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Mise à jour le 20.01.2016