Un journal fermé, des journaux suspendus ou confisqués, des journalistes agressés : vers la suppression de la liberté de la presse ?

Reporters sans frontières est extrêmement inquiète du tour de vis opéré par les autorités soudanaises sur les médias indépendants et les voix contestataires, au cours du mois de septembre. Un journal a été fermé, plusieurs suspendus, deux journalistes agressés alors que le gouvernement a exprimé son intransigeance à l'égard des journaux qui consacrent des articles au parti d'opposition armé du Sudan People's Liberation Movement North (SPLM-N), aux événements de la région du Blue Nile et du Sud Kordofan. "Les dernières déclarations du président, qui a affirmé il y a un mois vouloir libérer tous les journalistes emprisonnés, n'étaient-elles qu'une mascarade politique visant à duper la communauté internationale?" s'est interrogée Reporters sans frontières. "Nous espérions que cette déclaration ouvrirait la voie à plus de respect de la liberté de la presse. Il n'en est rien. Les forces de sécurité déploient tout un ensemble d'actions qui vont du harcèlement policier à la confiscation pure et simple de journaux, pour museler la presse. C'est un retour en force de la censure auquel nous assistons," a déclaré Reporters sans frontières. Campagne de fermeture des journaux Le 27 septembre 2011, les services de sécurité soudanais (National Intelligence and Security Services – NISS) ont fermé le quotidien indépendant et arabophone Al-Jarida sur ordre des autorités soudanaises, sans préciser les raisons de cette décision. Le journal avait déjà été empêché de paraître plusieurs jours entre le 20 et le 22 août 2011 et ses exemplaires avaient été confisqués les 4 septembre 2011. Plus d'informations sur Al-Jarida Deux semaines plus tôt, le 10 septembre 2011, le Conseil national de la presse et des publications avait ordonné la suspension, pour une durée indéterminée, de six journaux sportifs - Habib Al-balad, Al-moshahid, Al-zaeem, Supper, Al-mireekh et Aalum Al-nigoom - accusés de manquer de professionnalisme et d'avoir commis des erreurs administratives. Ils seraient coupables d'avoir écrit des articles négatifs et d'avoir publié de fausses informations "nuisant à la sécurité et à la réputation du pays", selon l'organe de régulation des médias. Quatre des six journaux incriminés, Habib Al-balad, Aalum Al-nigoom, Al-zaeem et Al-moshahid ont déjà fait appel de cette décision. Ironie du sort, cette mesure radicale viole le Press Act, octroyant au Conseil de la presse le droit de suspendre les journaux pour une durée maximale de trois jours. Al-Midan, tri-hebdomadaire publié par le Parti communiste soudanais (SCP) subit régulièrement les pressions des forces de sécurité. Les récentes confiscations d'exemplaires, le 4, le 6 et le 8 septembre, relèvent de la censure. Le quotidien arabophone Al-Sahafa n'a pas pu paraître le 8 septembre 2011. Les journalistes, interdits de traiter de sujets sensibles Le 7 septembre 2011, Osama Said Ahmed, journaliste pour Al-Jazeera avait été brutalisé par les forces de sécurité alors qu'il couvrait les événements de la capitale de l'Etat du Blue Nile, Al-Damazeen. Quelques heures plus tard, la journaliste Tagwa Ahmed a été, elle aussi, victime du même traitement alors qu'elle couvrait les événements depuis un hôpital militaire. Quelques jours plus tard, le porte-parole de l'Assemblée nationale soudanaise, Ahmad Ibrahim Al-Tahir, avait accusé les partis d'opposition et les journaux d'entretenir des liens avec le mouvement armé du Sudan People's Liberation Movement North (SPLM-N). Les autorités soudanaises ont ainsi interdit aux médias de publier toute information relative au SPLM-N et imposé un black-out médiatique sur la situation au Sud Kordofan et dans la région du Blue Nile. Reporters sans frontières rappelle qu'à la veille de l'indépendance du Sud Soudan, le 8 juillet 2011, le Conseil de la presse avait annoncé le retrait des licences pour les journaux du Sud. Il y a tout juste un mois, le président Omar el-Béchir avait annoncé la libération de tous les journalistes emprisonnés au Soudan. Le lendemain, le journaliste du quotidien arabophone Al-Sahafa, Gafar Alsabki Ibrahim, détenu depuis le 3 novembre 2010, était sorti de prison. Mais Abdelrahman Adam, journaliste de Radio Dabanga, incarcéré le 30 octobre 2010, croupit toujours derrière les barreaux. Nous demandons sa libération immédiate. Photo : AFP / Ashraz Shazly
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Mise à jour le 20.01.2016