Un hebdomadaire indépendant cesse de paraître et ses journalistes fuient le pays

Reporters sans frontières dénonce le climat de peur pesant actuellement sur la presse indépendante éthiopienne après que l'hebdomadaire Addis Neger a décidé, le 4 décembre 2009, de cesser de paraître. Plusieurs de ses responsables ont quitté l'Ethiopie ces derniers jours par peur d'être arrêtés ou inquiétés par les autorités. "Alors que se profilent les élections générales de mai 2010, le spectre de la répression de 2005 à l'encontre de l'opposition et de la presse indépendante réapparaît. Nous déplorons le fait que la rédaction d'un hebdomadaire, saisie par la peur et inquiétée par une campagne de dénigrement, soit tout simplement contrainte de le fermer. Nous espérons que les promesses du gouvernement lui permettront de reparaître prochainement", a déclaré l'organisation. "Nous serons très attentifs, au cours de l'année 2010 politiquement sensible, à la liberté dont jouiront les médias et à la possibilité qu'auront les journalistes de travailler à l'abri des intimidations et de la peur", a ajouté Reporters sans frontières. Le 4 décembre, l'hebdomadaire en langue amharique Addis Neger, connu pour sa liberté de ton et ses critiques du gouvernement, a annoncé que sa parution du 28 novembre serait la dernière, et ceci jusqu'à nouvel ordre. La direction a motivé sa décision par la volonté du gouvernement, confirmée par plusieurs sources concordantes, de poursuivre le journal et ses membres en justice, sur la base de la loi antiterroriste adoptée cet été. Le journal progouvernemental Addis Zemen a publié ces dernières semaines une série d'articles virulents à l'encontre d'Addis Neger. Quant à la chaîne publique ETV, elle préparait la diffusion d'un documentaire à charge sur l'hebdomadaire. "Notre journal était un excellent exemple de presse indépendante, malheureusement, le gouvernement nous a rendu la tâche impossible", a déclaré Mesfin Negash, directeur de publication du journal, dans un communiqué dont Reporters sans frontières a obtenu une copie. Le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Bereket Simon, a cependant tenu à nier une quelconque volonté des autorités de s'en prendre à l'hebdomadaire. Le 15 juillet dernier, Reporters sans frontières avait adressé une lettre à Bereket Simon pour lui faire part de son inquiétude concernant l'adoption de la loi antiterroriste et les entraves à la liberté de la presse que ce texte est susceptible d'engendrer. L'organisation lui demandait de s'assurer que les journalistes, de la presse d'opposition notamment, ne seraient pas victimes d'une utilisation abusive de cette loi. Reporters sans frontières avait effectué une mission en Ethiopie, en octobre 2008, au cours de laquelle elle s'était entretenue avec Bereket Simon, alors conseiller du Premier ministre. Celui-ci avait fait part de la volonté du gouvernement éthiopien de mener une politique inclusive vis-à-vis de la presse et d'apaiser les conflits avec les journalistes.
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Updated on 20.01.2016