Un attentat-suicide à Peshawar fait 34 morts: un journaliste tué et huit autres blessés

Reporters sans frontières est révolté par la mort du journaliste pakistanais Abid Naveed. Agé de 35 ans, le reporter du quotidien Akhbar-e-Khyber, a été tué dans l'explosion, survenue dans la nuit du 11 juin 2011, dans un quartier résidentiel de Peshawar, capitale de la province de Khyber Pakhtunkhwa. L'explosion a fait trente quatre morts et a blessé huit autres journalistes. Reporters sans frontières, conjointement avec la Pakistan Federal Union of Journalists (PFUJ), la Tribal Union of Journalists (TUJ), et la Khyber Union of Journalists (KhUJ), appellent les autorités pakistanaises à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des professionnels des médias. "Nous sommes effaré par la violence et par la récurrence des attaques qui touchent le pays et la ville de Peshawar en particulier. Quand il ne s'agit pas des militants taliban ou des forces de sécurité, ce sont les attentats suicides commis par les extrémistes qui contribuent à l'instauration d'un climat de terreur pour tous les professionnels des médias, pour qui il est désormais impossible de travailler sans risquer la mort à chaque coin de rue," a déclaré Reporters sans frontières. "Il serait inacceptable que les autorités pakistanaises se bornent à condamner l'attaque et à promettre de trouver les responsables. L'impunité dont jouissent les auteurs des six meurtres de journalistes qui ont été perpétré depuis le début de l'année, démontre que le gouvernement n'a pas pris les mesures nécessaires pour assurer le bon fonctionnement de la justice. Il n'est pas trop tard pour le président Zardari et le Premier ministre Gilani, de faire de la sécurité des professionnels des médias, cibles privilégiées de toutes ces attaques, une priorité nationale. Un véritable combat doit être mené en amont, par le renforcement de la sécurité dans les zones les plus sensibles et par une réactivité accrue lors de menaces à l'encontre des médias, mais aussi en aval, lorsqu'il s'agit de mener des enquêtes visant à confondre les auteurs d'attentats et d'exécutions de journalistes", a déclaré l'organisation. "Nous tenons à rappeler l'urgence de l'instauration d'un système de protection pour tous les médias au Pakistan, compte tenu du rythme effréné des attaques et de la pluralité des sources des menaces auxquelles font face les médias. Chaque nouvel incident paralyse un peu plus les membres de la profession, obligés de se retrancher chez eux pour travailler, ou de se refuser la couverture d'un sujet qui pourrait leur valoir des représailles. Si ces attaques venaient à perdurer, une autocensure, déjà latente, s'installerait dans les médias pakistanais, et toute la population en paierait les conséquences," a ajouté l'organisation. Reporters sans frontières rappelle également que dans une fatwa sur le terrorisme, publiée en mars 2010, de l'ancien professeur et intellectuel pakistanais, Muhammad Tahir-ul-Qadri, les auteurs et les commanditaires des attentats sont présentés comme des ennemis de l’islam, dont la violence "n'a aucune place dans l'enseignement islamique, et qu'aucun argumentaire ne peut la justifier". Le 11 juin 2011 à 23h45, une première explosion de faible intensité, causée par un explosif placé dans les toilettes du restaurant Lala, a d'abord attiré des journalistes locaux venus couvrir l'incident. Quelques minutes plus tard, un homme non-identifié sur une moto a fait exploser son "gilet-suicide", provoquant la mort de trente quatre personnes et en blessant plus d'une centaine d'autres. Les bâtiments à proximité ont également été gravement endommagés. Par l'intermédiaire de son porte-parole, le mouvement des Tehrik-i-Taliban Pakistan (TTP) aurait nié toute responsabilité dans les attentats. Parmi les blessés figurent huit journalistes, dont le chef de bureau, Saifullah Gul, et le journaliste Imran Bukhari, de Dunya TV, le vice rédacteur de the News Barkatullah Marwat, et un jeune stagiaire du nom de Shafiullah, le journaliste de Geo TV Qazi Fazlullah, Ali Hashim, caméraman de la chaîne de télévision AVT Khyber, et deux journalistes du quotidien Akhbar-e-Khyber, Sheheryar et Riaz. Sept journalistes ont pu recevoir les premiers soins, et sont désormais hors de danger. Le stagiaire Shafiullah, toujours dans un état critique, a été hospitalisé au Centre soins des grands brûlés à Wah Cantt. En décembre 2009, Abid Naveed avait survécu à l'attentat-suicide sur le Club presse de Peshawar qui avait fait quatre morts et dix sept blessés. Selon les informations de Reporters sans frontières, plusieurs chefs de publications ont demandé à leur équipe de travailler depuis chez eux et de ne plus se rendre à leurs bureaux, fermés pour plusieurs semaines ou jusqu'à nouvel ordre. Certains envisagent même de déménager leurs bureaux dans des zones plus sécurisées. Avec cet attentat, le Pakistan, situé en 151ème position dans le classement de la liberté de la presse en 2010, devient le pays le plus meurtrier pour les professionnels des médias en 2011. Le bilan s'élève désormais à six morts depuis le début de l'année, et dix-sept morts depuis 2010. Le 5 mai dernier, Reporters sans frontières avait remis en main propre au Premier ministre Youssouf Raza Gilani, de passage à Paris, un rapport sur les violations de la liberté de la presse et avait attiré son attention sur l'impératif de la sécurité pour les professionnels des médias.
Publié le
Updated on 20.01.2016