Treize acteurs de l’information tués depuis le 8 juillet 2014

Alors que l’armée israélienne annonce le retrait de ses soldats de la bande de Gaza, Reporters sans frontières a recensé, depuis le début de l'opération militaire "Bordure protectrice" le 8 juillet dernier, la mort de douze journalistes et d’un collaborateur palestiniens, dont sept dans le cadre de leurs activités professionnelles. Les acteurs de l'information paient ainsi le plus lourd tribu depuis 2005 et le retrait de l'armée d'Israël de la bande de Gaza. Au total, l'offensive israélienne a déjà coûté la vie à plus de 1800 Palestiniens - en majorité des civils - et 67 Israéliens dont trois civils.

Reporters sans frontières recense treize journalistes et collaborateurs tués depuis le début de l’opération militaire israélienne à Gaza, dont sept dans l’exercice de leurs fonctions. Qu’ils soient victimes de raids aériens indiscriminés ou qu’ils soient délibérément visés, ces violations doivent faire l’objet d’une enquête indépendante et la responsabilité de leurs auteurs engagée", déclare Virginie Dangles, directrice adjointe à la Recherche de l’organisation. "Les professionnels de l’information ne doivent pas être pris pour cible par les belligérants. Ces derniers doivent respecter les conventions de Genève et leurs protocoles additionnels, ainsi que la résolution 1738 du Conseil de sécurité de l’Onu de 2006”.

Le 4 août 2014, le journaliste Hamada Khaled Makat, directeur du site d’information Saja News Agency a été tué lors d’un raid de l’armée israélienne au nord de la ville de Gaza. D’après le Syndicat des journalistes palestinien contacté par Reporters sans frontières Hamada Makat était sorti à l’aube couvrir les frappes israéliennes quand il a lui même été touché devant son domicile. Durant la seule journée du 2 août 2014, deux journalistes palestiniens sont décédés suite à des frappes de l’armée israélienne. Mohamed Nour Eddine Al-Dairi, 26 ans, photographe pour Palestinian Network for Journalism and Media - blessé alors qu’il couvrait le raid aérien sur le marché de Shuja’iya le 30 juillet dernier - a succombé à ses blessures à la tête. Son corps a été retrouvé deux jours plus tard, lorsque des équipes de secouristes ont pu accéder aux lieux du drame. Au total, l’attaque sur le quartier populaire de Shuja’iya a causé la mort de 17 civils, parmi lesquels trois journalistes.

Le journaliste freelance Chadi Hamdi Ayad, 24 ans, est décédé à son domicile, lors d’un bombardement israélien sur le quartier Al-Zaytoun dans le sud-est de Gaza. Son père a également trouvé la mort. La veille, Abdullah Nasr Fahjan, 21 ans, journaliste sportif pour la chaîne du Hamas Al-Aqsa TV, a été tué dans les bombardements sur la ville de Rafah (sud de la bande de Gaza). Son frère, Ahmed Fahjan, a confié à l’ONG Palestinian Center for Development and Media Freedoms (Mada) que le journaliste était présent dans la rue pour faire un reportage sur les Palestiniens ayant fui leurs foyers à l’annonce d’une attaque israélienne dans l’ouest de Rafah quand il a été touché par un drone. Gravement blessé à la tête, le journaliste a été transféré de l’hôpital Abou Youssef Al-Najjar à l’hôpital européen de Khan Younès où il est mort quelques heures plus tard.

Le 1er août déjà, l’équipe de l’agence de presse turque, Agence Anatolie, a essuyé des tirs de grenades assourdissantes lancés par des chars dans la région de Al-Zana à l’est de Khan Younès alors qu’elle couvrait le retour de Palestiniens chez eux, deux heures après l’entrée en vigueur d’une trêve. Des voitures appartenant à l’agence de presse chinoise China Xinhua News ont été détruites dans un bombardement israélien.

En Cisjordanie

Le 2 août 2014, Moussa Al-Qawasme, 31 ans, photographe à l’agence de presse Reuters a été blessé alors qu’il couvrait des heurts survenus dans le quartier de Bab Al-Zawiya à Hébron (sud de la Cisjordanie), et dans lesquels 50 personnes auraient été blessées. Dans une déclaration à Wattan News Agency, le photojournaliste affirme qu’il a été visé délibérément par l’armée israélienne, alors même qu’il portait un gilet par balles et un casque estampillés “Press”. Il a été transporté à l’hôpital gouvernemental d’Hébron pour y être soigné.

En parallèle des violences à l’encontre des professionnels de l’information, les autorités israéliennes continuent à maintenir en détention plusieurs journalistes palestiniens. La journaliste et activiste Bouchra Al-Tawil, et le caméraman de la chaîne Al-Aqsa TV, Ahmed Al-Khatib, arrêtés début juillet en Cisjordanie, sont toujours détenus en prison. Mohamed Mouna, correspondant de l’agence Quds Press International News Agency à Naplouse, a vu sa détention administrative prolongée de six mois, et ce pour la troisième fois consécutive. Actuellement en grève de la faim, le journaliste avait été arrêté le 7 août 2013, avant d’être présenté devant un tribunal militaire israélien qui a décidé de le placer en détention administrative.

Pendant ce temps, à l’étranger…

Le 1er août 2014, la porte-parole de l'ambassade d'Israël en Espagne, Hamutal Rogel Fuchs, a qualifié, sur sa page Facebook, la correspondante de la télévision nationale espagnole (TVE) à Jérusalem et envoyée spéciale à Gaza, Yolanda Álvarez, “d’'activiste” au service du Hamas. La diplomate accuse la journaliste d’être “la courroie de transmission des messages, chiffres, images et informations du Hamas”, ajoutant : “les chroniques dramatiques de Yolanda Álvarez, à commencer par l'abus d'adjectifs suivis des mises en scènes résultant d'un casting et d'une sélection de scènes servant les intérêts du Hamas ne sont ni plus ni moins le produit d'une activiste”.

Dans un communiqué publié le 2 août 2014, Macu de la Cruz, vice-présidente de RSF Espagne, a déclaré : “En plus d'être fausses, les accusations que lance l'ambassade contre la correspondante de TVE sont particulièrement graves parce qu'elles la mettent en danger”. Le comité de rédaction de TVE a souligné le travail «extraordinaire» de la journaliste.

Publié le
Updated on 20.01.2016