Saisie des équipements d'une chaine de télévision et attentat contre la Conatel

Reporters sans frontières dénonce la saisie, le 3 octobre, par la Commission nationale des télécommunications (Conatel, entité publique chargée de réguler les licences attribuées par l'Etat) du matériel permettant à la chaîne d'information continue Globovisión de retransmettre des informations en direct depuis la rue. L'association de défense de la liberté de la presse condamne également vigoureusement l'attentat à l'explosif dont a été victime la Conatel le soir même. "Ces deux événements sont extrêmement inquiétants. Ils démontrent la fragilité de la liberté de la presse au Venezuela alors que le pays entre dans une période électorale", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières. "Si, comme vous l'affirmez, ce n'est pas le contenu des émissions qui est en cause, alors ce n'est pas le contenu de la chaîne qui doit être sanctionné", a souligné Robert Ménard dans une lettre adressée à Diosdado Cabello, ministre des Infrastructures sous la tutelle duquel est placée la Conatel. Il a ajouté : "Sans se prononcer sur la responsabilité, ou non, de Globovisión dans les infractions qui lui sont imputées, notre organisation ne peut que condamner une décision qui réduit considérablement le pouvoir d'informer d'une chaîne de télévision". L'organisation a par ailleurs demandé à Isaias Rodríguez, procureur de la République, de la tenir informée des avancées de l'enquête sur l'attentat à la grenade perpétré le 3 octobre au soir contre la Conatel. "Reporters sans frontières, qui a souvent dénoncé comme dangereuses pour la liberté de la presse plusieurs décisions de la Conatel, ne peut accepter que l'on recourt à la violence pour réduire au silence un média ou une institution", a précisé l'organisation. Le 3 octobre 2003, des agents de la Conatel se sont présentés dans les locaux de la chaîne d'information continue Globovisión pour saisir du matériel de retransmission lui permettant de couvrir des événements en direct. Des antennes de la chaîne placées à deux endroits situés sur les hauteur de Caracas ont également été saisis. "Des indices permettent de présumer que Globovisión a utilisé des fréquences radioélectriques à Caracas sans l'autorisation de la Conatel", a expliqué le directeur de cette dernière, Alvis Lezama, pour justifier la saisie. Pour Diosdado Cabello, ministre des Infrastructures, "il s'agit d'un processus administratif. Globovisión est en état de fonctionnement. Nous ne sommes pas intervenus sur le contenu de la programmation". Le président Chávez a pour sa part déclaré : "Le Chávez permissif n'existe plus. Nous sommes et resterons attentifs à tout excès, surtout de la part des médias, afin d'appliquer la loi à chaque fois qu'il faudra le faire." Pour Alberto Federico Ravell, directeur de Globovisión, il s'agit "d'un attentat contre la liberté d'expression. Il a souligné que, ne pouvant couvrir les événements de la rue, la chaîne ne fonctionnait plus qu'à moitié. Selon lui, ils s'agit d'un pas vers des sanctions contre d'autres chaînes critiques à l'égard du Président. La Commission interaméricaine des droits de l'homme a immédiatement exigé la suspension de la mesure et la restitution de son matériel à la chaîne à titre de mesure conservatoire. Dans la nuit du 3 au 4 octobre, une grenade a été lancée contre le siège de la Conatel, provoquant des dégâts matériels mais aucune victime. Selon Jesse Chacón, ministre de l'Information et ancien directeur de la Conatel, "ce sont deux hommes qui circulaient sur une moto blanche qui ont jeté la grenade et pris la fuite". Pour Jesse Chacón, cet attentat est une réponse à la saisie du matériel de Globovisión la veille par la Conatel. Après la saisie, une violente manifestation de protestation avait eu lieu devant le siège de l'organisme public. Elle avait été dispersée par la police. En janvier et février 2003, Globovisión, RCTV, Televén et Venevisión, les quatre principales chaînes commerciales surnommées les "quatre cavaliers de l'apocalypse" par le Président et la chaîne régionale Televisón Regional de Táchira (TRT) avaient été informées qu'elles faisaient l'objet de procédures administratives en raison de leur couverture donnée à la grève générale déclenchée par l'opposition (décembre 2002 / janvier 2003). Il appartient au ministre des Infrastructures de se prononcer. Les chaînes risquent une amende, la suspension de leurs programmes, voire la révocation de leur licence. Entre le 31 octobre et le 3 novembre 2003, l'opposition tentera de collecter plus de 2 millions de signatures afin d'obtenir un référendum exigeant le départ du président Hugo Chávez.
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Mise à jour le 20.01.2016