RSF proteste contre le harcèlement de sa représentante en Ukraine

Le 9 octobre 2013, Reporters sans frontières a adressé une lettre aux principaux responsables des forces de l’ordre ukrainiennes pour leur demander de mettre un terme au harcèlement dont est victime sa représentante locale, du fait de ses activités de défense de la liberté de l’information. ------- A l’attention de :
M. le procureur général, Viktor Pchonka
M. le ministre de l’Intérieur, Vitaly Zakhartchenko
M. le chef des Services de sécurité, Oleg Yakymenko

Paris, le 9 octobre 2013
Reporters sans frontières, organisation internationale de défense de la liberté de l’information, souhaite attirer votre attention sur les graves manœuvres d’intimidation subies par sa représentante de longue date en Ukraine, Oksana Romaniuk. Le 8 octobre 2013, le contenu intégral du disque dur de son ordinateur personnel a été exposé sur un site dédié. Quelques jours plus tôt, des hackers avaient déjà publié (en la tronquant) une partie de sa correspondance électronique sur un autre portail. Cet incident constitue une violation intolérable du droit à la vie privée d’Oksana Romaniuk. En outre, nous y voyons une manœuvre d’intimidation et de revanche très claire à l’égard du travail de Reporters sans frontières en Ukraine. Nous sommes d’autant plus inquiets qu’un nombre croissant de journalistes indépendants ont été victimes d’agissements similaires ces derniers mois. Cette tendance, dont on ne saurait sous-estimer le pouvoir d’intimidation, est potentiellement lourde de conséquences pour la défense de la liberté de l’information dans votre pays. Elle ne saurait rester impunie. Nous vous demandons de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour mettre un terme à ces agissements et pour qu’une enquête complète et impartiale soit lancée, sur le fondement des articles 182 (violation de la confidentialité de données personnelles) et 361 (intrusion illégale dans le fonctionnement de systèmes informatiques) du code pénal ukrainien. A notre connaissance, les recherches lancées par la police ne se réfèrent pour l’heure qu’à l’article 356 du code pénal (voie de fait). De notre point de vue, cela ne constitue en aucun cas une base suffisante pour favoriser la manifestation de la vérité et l’adoption de sanctions adéquates. L’Ukraine a pris des engagements internationaux très clairs quant à la protection de la vie privée et de la liberté de l’information. En février 2013, elle a accepté plusieurs recommandations soumises dans le cadre de son dernier examen périodique universel devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies. En particulier, l’Ukraine a admis la nécessité de : • « créer un environnement favorable aux activités des journalistes et autres professionnels des médias et veiller à ce que toute agression contre ce secteur fasse l’objet d’une enquête totalement transparente et impartiale, suivie le cas échéant de poursuites contre les responsables » (recommandation n°97.119) ; • « mieux protéger les journalistes et combattre les abus et actes de violence à leur égard » (recommandation n°97.121). Au regard de ces engagements et de l’attachement répété des autorités ukrainiennes à la liberté de l’information, essentielle au fonctionnement d’une société démocratique, nous vous demandons de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour protéger la vie privée d’Oksana Romaniuk et traduire en justice les responsables du harcèlement dont elle est victime. En vous remerciant de l’attention que vous voudrez bien porter à ce courrier, je vous prie d’agréer l’expression de ma haute considération. Christophe Deloire
Secrétaire général de Reporters sans frontières (Photo: Thomas Samson / AFP)
Publié le
Updated on 20.01.2016