RSF demande la mise en place d’un véritable pouvoir civil, respectueux des libertés fondamentales

Un an après son arrivée au pouvoir et après six jours de manifestation, le président Mohamed Morsi a été destitué par l’armée, le 3 juillet au soir. Ce coup d’Etat militaire s’est paré d’un vernis civil. Lors de son allocution télévisée, consécutive au coup de force, le chef d'état-major Abdel Fattah Al-Sissi est, en effet, apparu entouré du représentant de l'opposition Mohamed El-Baradei et des principaux chefs religieux du pays : le grand imam Ahmed Al-Tayeb d'Al-Azhar, principale autorité sunnite d'Egypte et le patriarche copte orthodoxe Tawadros II. Mohamed Morsi est officiellement remplacé par le président de la Haute Cour constitutionnelle, Adly Mansour, qui devrait prêter serment ce 4 juillet. Reporters sans frontières demande au président par intérim d’appliquer, dans les plus brefs délais, la feuille de route exposée par Abdel Fattah Al-Sissi, afin que l’Egypte ne revive pas l’expérience autoritaire du Conseil suprême des forces armées, qui avait dirigé le pays entre la chute d’Hosni Moubarak et l’élection de Mohamed Morsi. “Meme si la Constitution a été suspendue, l’Egypte est signataire de nombreux traités internationaux, qui garantissent les libertés fondamentales. Le nouveau pouvoir civilo-militaire doit respecter ces engagements internationaux”, a déclaré l’organisation. Une nouvelle Constitution, pleinement respectueuse des droits de l’homme, notamment de la liberté de l’information, doit être adoptée dans les meilleurs délais. Un certain nombre de dispositions de la Constitution rédigée par les Frères musulmans fin 2012 doivent impérativement être amendées, sans pour autant donner de manière directe, ou indirecte, des pouvoirs exorbitants à l’armée. Des élections présidentielle et législatives, libres et démocratiques, doivent se tenir, dans le respect du pluralisme. Pour Reporters sans frontières, il est particulièrement inquiétant qu’une des premières mesures prise par ce nouveau pouvoir soit la fermeture de trois chaînes de télévision : Misr25 du Parti de la Liberté et de la Justice, des Frères musulmans, ainsi que Al-Hafiz et Al-Nas, connues pour leur proximité par les salafistes et soutenant ouvertement Mohamed Morsi. La police a investi les locaux de ces médias, officiellement pour éviter qu’ils ne diffusent des messages incitant à la haine et à la violence. Selon l'agence MENA, les directeurs de ces chaînes ont été arrêtés peu après l'annonce de la destitution de Mohamed Morsi, avant d’être relâchés quelques heures plus tard, à l'exception d'Ahmed Abdel Gawad. “Inaugurer une nouvelle ère qui se veut démocratique par un tel acte de censure est inquiétant. Dans un Etat de droit, seule une décision judiciaire peut fermer des médias. Nous demandons la réouverture de ces médias”, a déclaré Reporters sans frontières, qui condamne également l’attaque des locaux d’Al-Jazeera Mubasher par les forces de sécurité le 3 juillet dans la soirée, et l’interpellation de journalistes de la chaîne.
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Mise à jour le 20.01.2016