Rescapé d’un attentat à l’essence, un jeune directeur de médias reçoit l’ordre de quitter sa ville sous peine de mort

Faute d’avoir quitté la ville d’Ipiales (département de Nariño, sud-ouest) d’ici au 11 juin 2011, Mario Esteban López, 28 ans, propriétaire et directeur de la chaîne régionale Canal 22 RAV Televisión, risque d’être exécuté. Cet avertissement lui est parvenu dans la nuit du 8 juin dernier. Agressé par trois inconnus dans son véhicule à la sortie de son domicile, le 31 mai, le journaliste a failli être étranglé et brûlé vif. “J’ai pensé qu’ils m’enlevaient. J’ai senti l’odeur de l’essence, j’ai senti la pression du câble sur mon cou (…). Un homme en voiture s’est approché et a signalé (à ses complices) qu’il y avait des policiers. Je suis resté au milieu de la rue aspergé d’essence. Tout cela a duré une heure et demi”, a confié Mario Esteban López à Reporters sans frontières. Mario Esteban López vit sous la menace permanente depuis qu’il s’est emparé de questions sensibles touchant l’actualité locale. Il avait reçu un premier avertissement après avoir consacré un sujet aux actions entreprises par les habitants d’un quartier contre des dealers de drogue en l’absence de réactions des autorités. Une autre menace lui était parvenue, de la municipalité, lorsqu’il avait couvert une affaire de gestion touchant la police. Nariño est une région connue pour ses problèmes d’ordre public. Depuis le 5 juin, Mario Esteban López est également poursuivi pour “injure” et “diffamation” par le maire d’Ipiales, lequel lui reproche de l’avoir désigné comme commanditaire de l’attentat à l’essence du 31 mai. Le journaliste a démenti ces allégations. “J’ai des délires de persécution. J’ai dû retarder la date de mon mariage. Certains collègues, des journalistes proches de la municipalité, sont contre moi et disent que je sali l’image de la ville. Je veux faire pression sur le gouvernement pour qu’on m’accorde une protection et que je puisse exercer mon métier”, nous a-t-il également expliqué. “C’est sans attendre les résultats de l’enquête sur les menaces dont il est la cible que la police d’Ipiales doit fournir une protection à Mario Esteban López. Au lieu de le poursuivre en justice, pourquoi la municipalité n’a-t-elle pas réagi immédiatement à sa détresse après l’attentat du 31 mai ? Pourquoi le maire n’a-t-il jamais accepté l’offre du journaliste de passer à l’antenne de sa chaîne ?”, a déclaré Reporters sans frontières. Pays à très haut risque pour les journalistes, la Colombie n’en a pas fini avec un conflit armé pour lequel justice n’a jamais été rendue. A cet égard, Reporters sans frontières informe de la présentation, le 20 juin 2011 à 17 heures au Teatro México de Bogotá, du film Impunity, coréalisé par le cinéaste Juan Lozano et le journaliste Hollman Morris. Une œuvre majeure sur le fléau du paramilitarisme (bande-annonce sous-titrée en anglais).
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Updated on 20.01.2016