Représailles armées et violences policières contre les journalistes en augmentation

Le 22 août 2011, à Peshawar, plusieurs individus armés circulant à moto et en voiture ont attaqué Hazrat Khan Mohmand, journaliste pour la chaîne de télévision en langue pachto Khyber News TV. Le 19 août 2011, une équipe de télévision a été torturée par la police après avoir été empêchée de couvrir un attentat-suicide survenu dans un district tribal. Le 6 août 2011, la police a lancé un raid contre le siège du quotidien en ourdou Mashriq, à Peshawar. Reporters sans frontières condamne fermement ces attaques qui surviennent dans un contexte d’insécurité croissante pour la presse. Les journalistes sont trop souvent les cibles de représailles. Pas un mois ne passe sans que l'organisation ne recense un cas d'assassinat. Les violences policières ont enregistré une forte progression depuis le début de l'année. "Il est urgent que les autorités pakistanaises réagissent. Sans l’instauration rapide de mesures de sécurité, la province de Khyber-Pakhtunkhwa et les zones tribales (FATA) deviendront impossibles à couvrir pour les journalistes locaux, pris entre plusieurs feux. Mais alors qu’elle devrait enquêter sur les violences subies par les professionnels des médias, la police, par ses agissements, aggrave leur insécurité. Nous appelons la direction de la police de Peshawar à prendre des dispositions fermes pour mettre fin immédiate aux exactions policières, dont certaines sont extrêmement graves, et à punir les coupables,” a déclaré Reporters sans frontières. Le 22 août vers 14h30, l’équipe de Khyber News TV, composée du journaliste Hazrat Khan Mohmand, du rédacteur en chef, Syed Waqas Shah, du responsable technique, Gul Sher et de Nisar Khan d’Akhbar-e-Khyber (journal en ligne affilié à Khyber News TV), a été attaquée en plein centre de Peshawar, dans une zone considérée comme “zone de haute sécurité”, des bâtiments gouvernementaux et la Haute Cour de Justice étant situés à proximité. Sous les yeux de la police, deux motos et une voiture ont barré la route de l‘équipe de télévision et ont ouvert le feu. Les agresseurs ont grièvement blessé Hazrat Khan Mohmand à la tête à coups de pierres. Syed Waqas Shah a déclaré que les agents de police, qu’il a appelés au secours, n'ont pas cherché à leur porter assistance. Dans un état grave, Hazrat Khan Mohmand a été emmené au service d’urgence de l’hôpital Lady Reading. Cette tentative de meurtre ferait suite à une affaire de corruption rendue publique par la chaîne de télévision, impliquant Mian Iftikhar Hussain, ministre de l’Information de la province de Khyber Pakhtunkhwa (Nord-Ouest). Le ministre avait rejeté toute responsabilité, et avait accusé la chaîne de télévision de “diffamation ” et de publier des “rapports sans fondement”. Aucun suspect n’a été arrêté jusqu’à présent. Lors d’une manifestation organisée par l’union des journalistes de Khyber devant le Peshawar Press Club, le 23 août 2011, le président de l’organisation, Arshad Aziz Malik, a condamné la tentative d’assassinat contre Hazrat Khan Mohmand. Il a également demandé l’instauration d’une commission judiciaire chargée de trouver les coupables de l’attaque et de les traduire en justice. Reporters sans frontières soutient cette demande. (Peshawar, 23 août 2011) Violences policières Le 19 août 2011, le chef de bureau de Samaa TV, Shaukat Khattak, le caméraman Imran Khan et l'assistant travaillant dans la station mobile de transmission par satellite (digital satellite news gathering, DSNG), Anwar Khan, ont été torturés par la police après leur arrivée dans un hôpital où les blessés d’un attentat-suicide, survenu lors de la prière du vendredi dans une mosquée d'un district tribal des FATA, avaient été emmenés pour traitement. Contacté par Reporters sans frontières, Shaukat Khattak a déclaré: “Nous sommes venus avec notre véhicule DSNG à l'hôpital où les blessés ont été amenés après l'attentat-suicide qui a frappé les fidèles dans une mosquée de la ville de Jamrud du Khyber tribal. Quand nous sommes arrivés, on nous a dit qu'un nouvel attentat suicide risquait de se produire et que les médias devaient rester à l'écart. Nous avons suivi les instructions de la police, et alors que je parlais au téléphone un policier m'a frappé par derrière”. Les trois hommes ont ensuite été emmenés au poste de police de Hayatabad, où ils ont été détenus plusieurs heures avant que des journalistes n'interviennent pour obtenir leur libération. Selon le chef du bureau de Samaa TV, le caméraman Imran Khan et l'assistant du véhicule DSNG, Anwar Khan, auraient été gravement blessés aux mains: "Je crains qu'ils ne souffrent de fractures car la police nous a violemment frappés". Ce passage à tabac survient quelques jours après que le chef de la police, Fayyaz Toroo, a mis en place une commission chargée d'examiner des cas de violences policières contre des médias. Les journalistes locaux ont également protesté devant les bureaux de l'autorité provinciale (Chief Minister), et le président de l'union des journalistes de Khyber, Arshad Aziz Malik, a condamné les faits. Les violences policières sont en augmentation dans la région. Le 6 août dernier, la police avait perquisitionné le siège du quotidien en ourdou Mashriq, le plus vieux journal de Peshawar, prétextant qu'un criminel s'y était réfugié. Le raid avait entraîné des protestations de nombreux journalistes. Sous leur pression, le chef de la police, Fayyaz Toroo, avait suspendu les fonctionnaires responsables de l'attaque. Le Pakistan est le pays le plus meurtrier dans le monde pour les professionnels des médias en 2011 avec le triste record de huit journalistes assassinés.
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Updated on 20.01.2016