Reporters sans frontières demande à la Turquie d'appliquer la jurisprudence européenne sur la liberté d'expression

La Cour européenne des droits de l'homme a condamné, le 25 juillet 2006, la Turquie, pour son manque de respect de la liberté d'expression. Reporters sans frontières salue cette décision et demande aux autorités turques de ne plus faire de la question kurde un sujet tabou.

Reporters sans frontières se félicite de la décision de la Cour européenne des droits de l'homme de condamner la Turquie, pays qui bafoue régulièrement la liberté d'expression. Le 25 juillet 2006, la Cour a estimé que l'Etat turc avait violé l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, relatif à la liberté d'expression, en poursuivant abusivement deux journalistes d'un quotidien prokurde. Leur crime est d'avoir évoqué le procès d'Abdullah Ocalan, leader du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK-Kongral Gel) dans un article publié en 2000 ainsi qu'une lettre dont ce dernier était l'auteur. La Haute juridiction européenne a estimé que la Turquie n'aurait pas dû sanctionner les journalistes, étant donné qu'aucun des propos relatés n'appelait à faire « usage de la violence, ni à la résistance armée, ni au soulèvement ». « Cette décision de la Cour illustre parfaitement les difficultés auxquelles sont confrontés les journalistes en Turquie. Ces derniers ne peuvent librement évoquer la question kurde sans être accusés de collaboration avec les rebelles séparatistes du PKK-Kongral Gel. L'Etat turc ne tolère pas la critique et vient d'adopter une nouvelle loi antiterroriste qui va considérablement élargir les sanctions contre la presse. La Turquie doit se référer à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme pour trouver un compromis entre ses préoccupations sécuritaires et le respect de la liberté de la presse », a déclaré Reporters sans frontières. Cihan Capan, rédacteur en chef du quotidien prokurde Ozgur Bakis, avait été condamné en 2000 à treize mois de prison. Le jugement avait été assorti de plusieurs amendes ainsi que pour Halis Dogan, le propriétaire du journal. La peine de prison requise pour Cihan Capan n'a jamais été exécutée. Le journal avait été saisi à plusieurs reprises au cours de l'année 2000 et condamné par les autorités à verser des amendes conséquentes, notamment au titre de la loi antiterroriste. Cihan Capan et Halis Dogan ont été dédommagés par la Cour pour préjudice moral, à hauteur de 5 000 et 7 000 euros.
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Updated on 20.01.2016