Reporters sans frontières demande aux candidats aux élections législatives de s'engager en faveur de la liberté de la presse

Alors que les Marocains sont appelés aux urnes, le 27 septembre 2002, pour renouveler au suffrage universel la Chambre des représentants, Reporters sans frontières demande aux candidats de s'engager à agir en faveur de la liberté d'expression au Maroc. "Cette année encore, de nombreuses entorses à la liberté de la presse ont été recensées dans le royaume : intimidations de journalistes, convocations, surveillance des publications indépendantes, etc. Par ailleurs, un code de la presse aux conséquences potentiellement liberticides a été adopté en mai 2002", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de l'organisation. "Puisque cette élection se veut un symbole de la "transition démocratique" du royaume, nous demandons aux futurs députés marocains de s'engager, durant les derniers jours de la campagne, à amender de manière substantielle le code de la presse et à renforcer les mesures législatives garantissant l'indépendance de la presse au Maroc", a-t-il ajouté. Le 16 août 2002, alors que Nordine Miftah, directeur de l'hebdomadaire Al Ayyam, se trouvait à Agadir, il a été convoqué, par téléphone, par un commissaire de police qui lui demandait de venir "immédiatement" à Casablanca. Il a été interrogé plusieurs heures sur une interview, parue le 11 juillet 2002, d'un leader islamiste, Abdallah el Chadli. Deux jours plus tard, c'était au tour de l'auteur de l'interview, Anas Mezzour, d'être convoqué pour les mêmes raisons. Le 12 juillet, Karim Selmaoui, photographe du Journal hebdomadaire, n'a pas été autorisé à se rendre à l'esplanade du Mechouar (situé en face du palais royal à Rabat) où se déroulait la célébration publique des noces royales. Un fonctionnaire du ministère lui a ordonné de descendre de la voiture officielle qui devait l'emmener en compagnie de l'envoyé spécial de Paris Match et de l'équipe technique d'Al-Jazira, sur les lieux des festivités. Le journaliste était pourtant dûment accrédité par le ministère de la Communication. Le 14 février, la cour d'appel de Casablanca avait condamné Aboubakr Jamaï, directeur de la publication de ce même journal, et Ali Amar, directeur général, à respectivement, trois et deux mois de prison avec sursis et à 500 000 dirhams (environ 50 000 euros) de dommages et intérêts. Mohamed Benaissa, actuel ministre des Affaires étrangères, avait porté plainte suite à une série d'article parus qui dénonçaient sa procédure d'achat, en 1996, d'une résidence à Washington pour le compte de l'ambassade du Maroc. Il était à l'époque ambassadeur aux Etats-Unis. Le 10 juillet, le jugement de l'hebdomadaire Demain magazine a été reporté au 11 décembre. Le 21 novembre 2001, Ali Lmrabet, directeur de publication de l'hebdomadaire Demain Magazine, avait été condamné à quatre mois de prison et une amende de 30 000 dirhams (environ 3 000 euros) par le tribunal de Rabat. Il était poursuivi pour "diffusion de fausses informations portant atteinte à l'ordre public ou susceptibles de lui porter atteinte". Le 8 et 9 mars 2002, un journaliste espagnol, Ignacio Cembrero, d'El Pais, quotidien espagnol, a fait l'objet d'une filature. Il était arrivé la veille à Rabat pour écrire des articles sur le Sahara occidental. La presse islamiste n'a pas non plus été épargnée. Depuis le début du mois d'avril 2001, il est impossible d'accéder, depuis le Maroc, au site Internet de Rissalat Al Foutouwa (www.fotowa.com). Aljamaa.org et yassine.net, sites crées par l'association islamiste Justice et bienfaisance, hébergés sur des serveurs situés en dehors du Maroc, ne sont également plus accessibles depuis le Maroc. Le 6 mai 2002, le projet de loi sur le code de la presse a été définitivement approuvé par la Chambre des représentants. En dépit de certains points positifs (allègement des sanctions pénales auxquelles s'exposent les journalistes, réduction du montant des amendes, assouplissement des procédures à la création d'un titre, justification des saisies), ce code demeure particulièrement sévère. Les peines de prison punissant la diffamation du roi, des princes et des princesses, ont été maintenues. Les auteurs de ces délits sont désormais passibles de trois à cinq ans de prison contre cinq à vingt ans de prison dans l'ancien code. Par ailleurs, l'article 29 maintient le droit, pour le gouvernement, d'interdire des journaux marocains ou étrangers "si les publications concernées sont de nature à porter atteinte à l'islam, à l'institution monarchique, à l'intégrité territoriale ou à l'ordre public".
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Updated on 20.01.2016